Après d’interminables allers et retours entre les deux chambres du Parlement et la décision du Sénat de rejeter sans nouvel examen le projet de loi qui lui était soumis, l’Assemblée nationale a enfin pu adopter le projet de loi bioéthique. Il était temps… Cela fait 4 années que cette majorité évoque ce sujet comme une telle évidence, que beaucoup avaient cru à un soutien sincère, alors que l’aval du Comité d’éthique est officiel depuis juin 2017 !
Las… Le texte finalement voté, contient différentes mesures contestées par les associations et en oublient de nombreuses attendues aussi.
Mesure phare de ce texte, objet de tant de débats, le projet de loi ouvre la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes et aux femmes seules. Cela se fera finalement dans les mêmes conditions que pour les couples hétérosexuels s’agissant du remboursement de la procédure par la Sécurité sociale. La PMA sera donc intégralement remboursée pour les femmes jusqu’à l’âge de 43 ans.
L’établissement du lien de filiation à l’égard de la mère n’ayant pas porté l’enfant se fera par le biais d’une reconnaissance conjointe anticipée (RCA) de l’enfant devant notaire, et les enfants nés de PMA pourront, à leur majorité, avoir accès à des données non identifiantes concernant le donneur et même à son identité s’ils le souhaitent.
Les enjeux de la PMA et les manques de la loi
Différents termes autour de la PMA ont été médiatisés par les associations pendant les débats, illustrant les enjeux que le PJL bioéthique a choisi d’oblitérer. Voici quelques éléments de compréhension des manques de ce texte, sur la PMA.
La ROPA : Réception de l’ovocyte par la partenaire. Variante de la fécondation in vitro, c’est la méthode consistant pour une femme à se faire inséminer avec les ovocytes (ovule) de sa partenaire. Cela permet à un couple d’avoir, avec un gamète, une grossesse ne nécessitant qu’un don de sperme en plus. Dans les couples où la femme pouvant avoir un enfant, n’est pas celle ayant des ovocytes, cela évite les longs et compliqués parcours pour obtenir un don d’ovocyte en plus.
PMA post-mortem : dans un couple hétérosexuel, la femme et l’homme peuvent faire conserver leurs gamètes pour les procédures de PMA. Lorsque la mort du père survient après le don des gamètes, la récupération de celles-ci est interdite et oblige la femme à tenter une PMA « en célibataire » et à s’inscrire dans un parcours pour trouver un don de sperme d’un autre donneur alors qu’elle dispose de gamètes.
RCA : reconnaissance conjointe anticipée. Déclaration établie par le couple de femmes qui entame une procédure de PMA pour établir la filiation pour les deux personnes. Cette déclaration se fait chez un notaire (acte d’état civil qui devient privé et payant). Outre les questions sur cette forme d’établissement de la filiation que l’on peut saluer pour enfin intégrer les projets parentaux non hétérosexuels, il est aberrant que l’on considère que les couples lesbiens aient à payer auprès d’une personne privée. Un acte que les célibataires, les couples, les familles adoptantes, peuvent faire auprès des institutions publiques. Cela crée une différenciation discriminante qui ne frappe que les lesbiennes.
De la même manière, cette RCA est aussi imposée aux femmes mariées, en dépit du caractère de présomption que le mariage induit pour les couples hétérosexuels. Un droit civil à deux vitesses est donc créé, qui conduit les seules lesbiennes à ne pas être logées à la même enseigne que les autres.
Remboursement de la PMA : jusqu’à 43 ans. La mise en place de critères médicaux pour les actes liés à la PMA et sa couverture pour les personnes jusqu’à un certain âge relève de l’arbitraire et conduit des couples de femmes à aller à l’étranger parce qu’une forme de « date de péremption » leur est imposée. En Espagne, le seuil est de 50 ans.
PMA pour les personnes trans : Alors que la démédicalisation et la fin de la stérilisation ont été actées par la loi, les personnes trans ne peuvent pas avoir accès aux techniques de PMA. Il sera toujours refusé à un homme trans, qui peut pourtant tomber enceinte, avec ses ovocytes ou non, de pouvoir accéder à la PMA, en France, pour avoir des enfants, par le simple fait d’avoir fait modifier son genre à l’état civil.