Nous demandons aux parlementaires en charge du projet de loi relatif à la révision des lois de bioéthique d’inclure la FIV ROPA dans les nouvelles dispositions ouvertes aux couples de femmes.

Le projet de loi relatif à la bioéthique est actuellement en discussion au Parlement. Il porte une réforme très attendue : l’ouverture à toutes les femmes de la Procréation médicalement assistée (PMA) avec don de sperme, d’ovocytes ou d’embryon. Cette mesure majeure concernera un très grand nombre de femmes, jusqu’alors contraintes de se rendre à l’étranger pour fonder une famille. Parmi elles se trouvent les couples de femmes qui, pour devenir mères, doivent recourir à un don de sperme. De nombreuses techniques de PMA peuvent être mises en œuvre pour les prendre en charge, allant de l’insémination artificielle avec donneur à la Fécondation In-​Vitro (FIV), en passant par une technique possible uniquement au sein d’un couple de femmes : la FIV avec Réception des Ovocytes de la Partenaire. Cette technique, dite FIV ROPA, est semblable à une FIV classique, à une différence près : l’embryon conçu par FIV est issu de l’une de ses mères et porté par la seconde.

Lors de son audition devant la commission parlementaire, la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn a exprimé l’avis défavorable du gouvernement sur la FIV ROPA en qualifiant celle-​ci de « don dirigé ». Ne respectant pas le principe d’anonymat du don entre donneurs et receveurs, la FIV ROPA, irait, selon à elle, à l’encontre de la loi française. La ministre a ajouté que l’autorisation de la technique de FIV ROPA, en créant un lien biologique entre la mère qui n’accouche pas et son enfant, irait à contresens de la démarche du gouvernement dont l’objectif est de reconnaître pleinement la maternité d’intention.

Comme l’ont rappelé à maintes reprises de nombreux députés lors de la même audition, la définition du don de gamète repose sur un principe inébranlable : un donneur ou une donneuse n’est en aucun cas un parent. Il ou elle donne de sa capacité à procréer pour que d’autres deviennent parents et, ce, sans aucune intention de devenir soi-​même parent de l’enfant qui naîtra de son don. C’est le sens de son geste et la loi le lui garantit. Cette distinction entre parent et donneur est le principe fondateur du don de sperme, d’ovocytes ou d’embryon.

Lorsqu’un couple de femmes réalise une FIV ROPA, aucune d’entre elles n’est donneuse puisque les deux sont mères de l’enfant. La FIV ROPA n’est donc ni un don d’ovocytes, ni une Gestation pour autrui (GPA), mais simplement une maternité partagée, au sein d’un couple de femmes, dans laquelle l’une des mères conçoit l’enfant alors que l’autre le met au monde. Cette manière particulière de donner la vie permet aux deux femmes de contribuer à la venue au monde de leur enfant. Contrairement à une idée reçue, les couples de femmes qui partagent la maternité physique grâce à une FIV ROPA ne nient ni le rôle joué par le donneur de sperme dans la conception de leur enfant ni le recours au don qui leur a permis de fonder une famille.

La FIV ROPA présente également des avantages sur le plan médical : elle permet de suppléer au défaut de fertilité d’une des femmes du couple en recourant aux ovocytes de l’autre femme, sans avoir à se tourner vers un don d’ovocytes. Elle est alors conforme aux dispositions encadrant la PMA qui prévoient que les FIV soient réalisées en priorité à partir des ressources du couple afin de réserver l’accès à la banque de sperme ou d’ovocytes aux personnes chez qui ceux-​ci sont déficients ou absents. Notons également que les couples hétérosexuels dont l’homme est transgenre et a conservé ses ovocytes sont également susceptibles de recourir à une FIV ROPA.

Enfin, l’autorisation de la FIV ROPA s’intègre parfaitement aux valeurs portées par le projet de Loi. Si le gouvernement exprime par ce projet de Loi sa volonté de reconnaître dans notre droit la maternité d’intention, il témoigne également, à travers la filiation par Reconnaissance conjointe, d’un souhait de mettre en avant le projet parental solidaire au cœur des familles homoparentales. Lorsqu’elle est choisie par un couple de femmes, la FIV ROPA incarne pleinement la solidarité de leur projet parental, de l’engagement à l’engendrement.

Nous, professionnels de médecine de la reproduction, sociologues, anthropologues, juristes, association de défense des patients en PMA et des familles homoparentales, demandons aux parlementaires en charge du projet de loi relatif à la révision des lois de bioéthique d’inclure la FIV ROPA dans les nouvelles dispositions ouvertes aux couples de femmes.

Nous accueillons les couples de femmes et leurs enfants dans notre paysage familial : donnons-​leur la liberté de dessiner ensemble le projet parental qui leur ressemble.

Ont également signé cette tribune :

  • Larissa Meyer, Présidente de l’association Réseau Fertilité France ;
  • Mikaël Agopiantz, Gynécologue médical et médecin de la reproduction ;
  • Baptiste Beaulieu, médecin généraliste, écrivain et chroniqueur sur France Inter ;
  • Pr Paul Barrière, médecin de la reproduction, chef du pôle Femmes, Enfants, Adolescents au CHU de Nantes ;
  • Régine Barthélemy, avocate, membre du Conseil National des Barreaux ;
  • Dr Joëlle Belaisch Allart, gynécologue obstétricienne spécialisée en médecine de la reproduction ;
  • Flora Bolter et Denis Quinqueton, co-​directeurs de l’Observatoire LGBT+ de la Fondation Jean Jaurès ;
  • Vincent Brès, président de l’association PMAnonyme ;
  • Jérôme Courduriès, anthropologue, maître de conférences à l’université Toulouse-​Jean Jaurès ;
  • Adrien Gantois, président du Collège National des Sages-​femmes de France ;
  • Martine Gross, sociologue, chercheuse émérite au CNRS ;
  • Dr Juliette Guibert, gynécologue obstétricienne spécialisée en médecine de la reproduction ;
  • Pr Michaël Grynberg, gynécologue obstétricien, chef du service de médecine de la reproduction, hôpital A. Béclère, Clamart ;
  • Dr Serge Hefez, psychiatre et psychanalyste ;
  • Laurence Herault, anthropologue, professeure à l’université d’Aix-Marseille ;
  • Émilie Jouvet, réalisatrice et mère d’un enfant conçu par don ;
  • Marie Labory, journaliste et mère d’enfants conçus par don ;
  • Annabel Maestre, responsable de l’antenne Contact 13 ;
  • Caroline Mecary, avocate au barreau de Paris ;
  • Pr Israël Nisand, gynécologue obstétricien, président du Forum Européen de Bioéthique ;
  • Pr François Olivennes, gynécologue obstétricien spécialisé en médecine de la reproduction
  • Dr Catherine Rongières, gynécologue obstétricienne, coordinatrice du pôle d’assistance médicale à la procréation au CHU de Strasbourg ;
  • Irène Théry, sociologue, directrice d’études à l’EHESS ;
  • Marina Zuccon, présidente du Carrefour des chrétiens inclusifs ;
  • Inter-​LGBT ;
  • Association ADFH ;
  • Association ACTHÉ ;
  • Association Artogalion ;
  • Association CLARA ;
  • Association DIVINES LGBTQI+ Visibilité Représentativité Afro-​Carïbéenne LGBTQI+ ;
  • Association MAIA ;
  • Association MamEnSolo ;
  • Association HES (Homosexualité Et Socialisme) ;
  • Association SOS homophobie.