L’Ukraine a été envahie la semaine passée par la Russie de Poutine. Cette attaque d’ampleur laisse présager le pire pour les ukrainien·ne·s et pour la minorité LGBTI notamment au regard de l’action russe depuis des décennies…

C’est évidemment la sidération et l’effroi qui a saisi chacun après l’invasion de l’Ukraine par la Russie la semaine passée. Une attaque que nul ne peut défendre et que nous condamnons en accord avec ce qui nous porte comme organisation de gauche et dans le respect du droit international – dont le fondamental droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Et par solidarité, humanisme, et parce que nous avons à cœur la défense de valeurs qui ne sont pas négociables, nous souhaitons affirmer notre soutien au peuple ukrainien dans cette période.

C’est la décision aberrante d’un seul homme, Vladimir Poutine qui, d’un revers de main, déchire les traités internationaux, qui aura, à nouveau, ramené la guerre en Europe, par l’invasion d’un pays par son voisin. Il ne peut être question d’une quelconque légitimation de cet acte et les instances internationales doivent appliquer les textes sur lesquelles elles sont basées. Il faut également que la Russie soit suspendue de toutes celles dans lesquelles elle siège.

La guerre est un fléau pour tous les peuples. Et elle se révèle souvent encore pire pour les minorités, dont les LGBTI+ donc. C’est toute une population qui souffre des horreurs qu’elle convoie : blessures corporelles, traumatismes, déplacements forcés, couples et familles séparées, destructions des lieux de vie, morts… Si nous prenons la parole en tant qu’organisation de défense des droits LGBTI+, il ne saurait être question de laisser croire que les seuls LGBTI+ auraient à subir des drames et des atrocités. Bien loin de là. Il faut pourtant signaler que les LGBTI+ sont particulièrement dans le viseur d’un pouvoir russe qui a très largement démontré son obsession anti-​LGBTI+ (entre autres boucs émissaires).

La complaisance inacceptable de certains médias et responsables politiques en France

Depuis trop d’années en France, les relais serviles et délibérés d’un autocrate « viriliste » et caricatural au pouvoir depuis quelques 22 ans non stop (bientôt septuagénaire), diffusent complaisamment ses positions et sa grossière propagande. Qu’il s’agisse de médias, de polémistes courant les plateaux télés et radios, ou d’élu·e·s situés à droite, à l’extrême droite évidemment, mais aussi au sein de la gauche. Des votes récents au Parlement européen l’illustrent encore…

Nous ne parlerons même pas des responsables politiques actuels ou passés qui vont demander des prêts, solliciter un appui, s’afficher publiquement, ou vont jusqu’à aller travailler directement ou indirectement pour le pouvoir russe.

Il semble compliqué pourtant de ne pas constater ce qu’est la Russie sous Poutine : médias aux ordres, opposants muselés, emprisonnés ou tués, élections truquées. Les diplomates et services de renseignement sérieux affirment que Poutine et ses proches sont très corrompus, captant les richesses du pays au détriment de sa population. Tous les attributs des dictatures…

Les LGBTI+ ciblés spécifiquement

Plusieurs alertes officielles avaient indiqué que les troupes russes ont la volonté de tuer des LGBTI+ d’Ukraine aux côtés des opposants russes ou bélarusses exilés. Il ne s’agit en rien d’une surprise compte tenu de l’action constante du pouvoir russe contre les LGBTI+.

Les réseaux LGBTI ukrainiens, dont la Pride de Kyiv, ont pu indiquer leur évidente condamnation de l’invasion et leur demande que les groupes LBTI alliés dans les pays étrangers aident à faire pression sur les dirigeants russes.

Toute « Pride » est encore strictement interdite en Russie (depuis la 1re tentative en mai 2006, à laquelle nous étions représentés). Les LGBTI+ n’y ont aucune reconnaissance, aucun droit. Depuis juin 2013 avec l’« interdiction législative de la propagande homosexuelle en Russie » (que certains pays de l’UE ont hélas singée), la simple mention de leur existence est censurée ou traquée de manière maladive, jusque dans les fictions étrangères (films & séries) quand elles sont diffusées en Russie. Cette « ambiance » et ce cadre légal complexifie (à tout le moins) le travail de terrain et mène les organisations russes de défense des droits LGBTI à être de plus en plus traqués. Le tout, mené main dans la main avec les très homophobes dirigeants de la puissante Église orthodoxe russe.

Si de fait plusieurs pays de l’Est de l’Europe servent de base arrière pour des livraisons de matériels, de vivres, les soins médicaux, et l’action humanitaire, il faut vraiment rester très vigilants afin de ne pas pour autant « valider » les lois scélérates et actions anti-​LGBTI+ violentes et haineuses des dirigeants actuels de la Pologne (cf. les pseudos « zones sans LGBT ») et de la Hongrie…

Il ne peut qu’être inquiétant que les forces armées d’un pouvoir russe, obsédé par les LGBTI+, aient donc reçu pour consigne de cibler des LGBTI+, des militants et défenseurs des droits. Cela ne peut que rappeler le tragique exemple de la Tchétchénie « rasée » par le pouvoir russe.

Les tragédies de la Tchétchénie, risques évidents pour l’Ukraine

Car l’invasion de l’Ukraine ne peut que faire redouter un scénario à la tchétchène. Dans les nombreuses conséquences possibles d’une victoire russe, les stratégies d’« épuration » ou de « génocide » (tel que l’avait décrit la journaliste de la « Novaia Gazetta » Anna Politkovskaïa — qui a été assassinée), l’application des politiques intérieures similaires à celles que la Russie connait (et donc fortement préjudiciable aux LGBTI+ évidemment) ou la mise en place d’un régime fantoche, marionnette de Moscou, similaire à celui de Ramzan Kadyrov (allié corrompu de Poutine) en Tchétchénie, et de la traque mortifère qu’il a constamment menée contre les LGBTI+. Il indiquait vouloir purger les gays du sang tchétchène afin de le « purifier ».

En 2017, nous dénoncions les exactions que le régime local avait lancé contre les personnes soupçonnées d’homosexualité, à travers la figure d’un artiste connu, Zelimkhan Bakaev, torturé puis assassiné. Il y a encore une semaine, des condamnations ont été prononcées à l’encontre de deux frères ayant fui le régime tchétchène pour « terrorisme ».

Tchétchénie : ne détournons pas les yeux !

En 2014, après l’invasion du Donbass, un centre accueillant des réfugiés LGBTI+ de l’est de l’Ukraine avait ouvert à Kiev suite aux combats organisés par la Russie pour s’emparer de la Crimée.

Face aux menaces de Poutine, la communauté internationale, notamment l’UE et les USA, a réagi vite, a décidé de sanctions économiques, avec souvent des décisions votées à l’unanimité contre la Russie. Pour l’UE notamment, ce sont des pas de géants, inédits, y compris en livrant des armes aux Ukrainiens. Et comme l’Ukraine a frappé à la porte de l’UE depuis 2008, il est temps d’accélérer son adhésion, pour l’ancrer plus encore dans la démocratie durable et la paix, et la protéger de son voisinage.

Faciliter l’accueil des réfugié·e·s ukrainien·ne·s

Nous appelons les autorités françaises à immédiatement faciliter l’accueil des réfugié·e·s ukrainien·ne·s comme beaucoup de nos voisins européens l’ont déjà mis en place (et les ressortissants qui y vivent avec un visa : étudiants, travailleurs…), y compris LGBTI+, afin qu’ils soient vite mis à l’abri, vraiment aidés et que les procédures soient réduites au minimum pour leur permettre de vivre ici le plus normalement possible, de manière provisoire ou durable.

Nous exigeons aussi, dans l’urgence vitale actuelle, que soient enfin allégées et nettement accélérées les procédures permettant aux parents français ayant légalement entamé un processus familial via une GPA en Ukraine, qu’ils soient aidés à revenir dès que possible en France, y compris avec leur enfant, reconnu dans les meilleurs délais.

Maintenir la pression pour faire cesser la guerre

Nous saluons les artistes, sportifs et acteurs de la société civile russes et tou·te·s les citoyen·ne·s qui ont eu le courage de dire publiquement « Non à la guerre ! ». Les manifestations et les mobilisations que l’on peut voir dans les grandes villes russes sont une illustration de plus d’une population qui ne souhaite pas avaliser les politiques poutiniennes. Et les sanctions fortes enfin actées par l’UE, le G7, et d’autres pays ainsi que le bannissement de l’UE des organes de propagande qu’étaient les télés et « agences de presse » sont à saluer.

Les biens mal acquis qui sont présents sur les territoires étrangers et les avoirs des dirigeants du régime russe devront être saisis et rendus à son peuple.

Nous notons au passage avec satisfaction de nombreuses décisions d’annulations de compétitions sportives en Russie ou de refus d’épreuves face à ce pays (déjà fort entaché de nombreux cas de dopages avérés… le mensonge et la triche érigés en règle chez Poutine ?). Mais certains sports rechignent hélas encore, comme le football via la FIFA et sa maigre proposition de faire jouer sous bannière neutre, heureusement refusée par certaines fédérations. L’UEFA doit aussi s’interroger rapidement sur son principal sponsor, le géant russe public GazProm, outil majeur de « soft power » pour Poutine…

Les attaques russes doivent cesser, les soldats et mercenaires doivent faire taire leurs armes, et revenir dans leur pays. L’Ukraine et ses dirigeants élus doivent retrouver dès que possible leur pleine liberté et leur souveraineté territoriale. Et nous ne pouvons qu’espérer que le peuple russe puisse rapidement connaitre la fin de ce pouvoir et voir le retour de la démocratie.