À peine nommée, la nouvelle Ministre de l’Education Nationale, des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra a, malgré elle, mis les projecteurs sur l’établissement catholique privé sous contrat avec l’Etat Stanislas, où elle scolarise ses enfants et sur le traitement accordé par son prédécesseur, Gabriel Attal, à un rapport pourtant accablant de l’Inspection générale de l’Education Nationale sur cet établissement.
1) Etablissement Stanislas : ce que l’école ne doit surtout pas être
Le rapport de l’inspection générale de l’Education nationale de juillet 2023 révélé par Mediapart et commandé déjà suite à une enquête journalistique de ce même média en juin 2022 montre un établissement qui s’inscrit très loin du cadre de la République et des engagements et enseignements que se doivent de respecter tout établissement scolaire privé sous contrat avec l’Etat.
Condamnation de l’homosexualité, de l’IVG, de l’utilisation de moyens de protection et promotion des thérapies de conversion, du viol, du sexisme, des stéréoptypes de genre, l’établissement Stanislas – notamment via son équipe pédagogique – est depuis des années l’antichambre du non-respect des lois, de la haine de l’autre et symbolise à lui seul ce que l’école ne doit surtout pas être.
De nombreuses études ont établi un lien direct entre la sur-suicidalité (taux de suicide plus haut que la moyenne) et les discriminations subies : les jeunes LGBT ayant subi à l’école des moqueries, du harcèlement, des insultes, des humiliations et/ou des violences ont ainsi 4 à 7 fois plus de risques d’effectuer une ou plusieurs tentatives de suicide au cours de leur vie que le reste de la population.
En France, 68 % des personnes LGBTQIA+ ayant été victimes d’intimidation, de menaces ou de commentaires blessants LGBTphobes l’ont été en milieu scolaire et 20 % déclarent avoir subi des injures ou des menaces verbales dans l’enseignement supérieur. Ainsi, les LGBTphobies en milieu scolaire contribuent au “stress des minorités” qui a pour conséquence un nombre de tentatives de suicide plus élevé chez les élèves LGBTQIA+ et un risque plus élevé d’abandonner leurs études car ils peuvent avoir intégré que l’école n’est pas une lieu accueillant. L’exclusion sociale des élèves LGBTQIA + est un problème de société que certain·e·s responsables politiques refusent de voir.
Pour remédier à ce problème, le Parlement européen a, dans sa résolution du 4 février 2014, affirmé que l’ensemble des programmes scolaires des États membres de l’Union Européenne doivent “promouvoir l’égalité et la lutte contre les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre”. De plus, en France, l’article L.123 – 2 du Code de l’Éducation dispose que le service public de l’enseignement supérieur doit contribuer à la lutte contre les discriminations, à la réduction des inégalités sociales ou culturelles, à l’amélioration des conditions de vie étudiante et à la construction d’une société inclusive. Ainsi prévenir et lutter contre les actes LGBTphobes font partie des missions légales de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.
L’école est ainsi le lieu des apprentissages scolaires mais aussi de 1ere expérience du vivre ensemble qui lui aussi s’apprend : l’école ne peut pas donc être un lieu de discriminations et de haine, encore moins quand celles-ci proviennent des adultes référents à savoir l’équipe pédagogique. L’École doit être un lieu d’inclusion, d’éducation au vivre-ensemble, à l’égalité des genres, à la découverte et au respect des différentes orientations sexuelles en plaçant l’égalité, la bienveillance et l’acceptation des différences au centre des relations entre les élèves.
2) Les Ministres de l’Education changent mais l’omerta demeure
Amélie Oudéa-Castéra, nouvelle Ministre en charge en autre de l’Education Nationale, a donc scolarisé ses enfants dans l’établissement Stanislas et nous nous inquiétons de facto de sa volonté de porter des politiques d’éducation inclusives, d’autant plus quand depuis le début de cette affaire elle cherche à minimiser l’homophobie et les politiques éducatives dangereuses qui sont prônées par l’établissement. Cette école forme une élite sociale, une élite dominante à laquelle on enseigne l’exclusion, la haine de l’autre, démarche que la Ministre contribue à entretenir en y scolarisant ses enfants.
Nous nous inquiétions encore quand elle-même et son prédécesseur devenu 1er Ministre, Gabriel Attal, ont visiblement organisé l’omerta autour de l’enquête administrative portant sur l’établissement. Depuis l’été 2023, celui-ci a refusé de rendre publique l’enquête administrative accablante sur l’établissement, comme il avait répondu aux abonnés absents sur l’enquête sur le suicide du jeune Lucas. Il y a manifestement chez Gabriel Attal et Amélie Oudéa-Castéra une volonté commune de protéger des institutions scolaires défaillantes ou volontairement excluantes, même quand la vie, le bien-être de milliers de jeunes sont en jeu.
Sous ce quinquennat, nous passons donc d’un Ministre qui n’encourage pas une enquête sur un harcèlement homophobe ayant conduit à un suicide, à une Ministre qui scolarise ses enfants dans un établissement promouvant les discriminations.
Quant à la Présidente de la Région Ile de France Valérie Pécresse, elle continue de soutenir l’établissement refusant de suspendre les subventions accordées, balayant ainsi les principes républicains les plus élémentaires alors que la Ville de Paris a fait le choix de suspendre immédiatement le financement obligatoire de l’établissement.
Nous demandons la mise en place immédiate des 14 préconisations du rapport de l’inspection générale avec un suivi régulier et précis des services de l’Education Nationale et un engagement public du Gouvernement pour soutenir la mise en œuvre de ce plan d’actions ainsi que la reprise de l’enquête administrative sur la mort de Lucas.