Le résultat des élections présidentielles 2020 en Pologne est donc quasi-définitif. Andrzej Duda, le candidat du parti Pis (Droit et Justice) a récolté 51,03 % des voix. Un score qui démontre une société fortement clivée, que ce candidat et son parti ont contribué à façonner largement depuis des années.
Ce parti national conservateur, ultra religieux, garde donc les pleins pouvoirs, dans un pays qu’une élection présidentielle aux débats tragiques et honteux aura contribué à polariser encore davantage.
Une campagne basée sur les discours de haine
En position de force, et depuis des années au pouvoir, le PiS n’a jamais cessé de multiplier les attaques et les invectives, par peur de voir ce qu’il estimait être son pré carré lui échapper.
Les personnes LGBTI ont constamment été l’objet de ces attaques virulentes et ordurières. Avec de clairs appels à la violence. Pour Duda, les LGBTI ne sont « pas des hommes », mais une « idéologie », et son adversaire ne pouvait avoir une « âme polonaise » pour d’autres responsables du PiS.
Les observateurs internationaux, et notamment l’OSCE, ont noté cette nette polarisation, accentuée par le manque d’impartialité dans les principaux médias lors de cette campagne. Ils ont aussi noté que : « au premier tour, la campagne du sortant et sa couverture par les diffuseurs publics ont été marquées par un discours homophobe, xénophobe et antisémite ».
Ces remarques ne sont pas celles d’un groupe militant. Ce sont celles d’observateurs neutres et impartiaux, qui veillent au respect des règles basiques de la démocratie. Règles qui ne se limitent pas à l’absence de fraude et à la sincérité des opérations de vote. Elles doivent concourir à la construction d’un espace de dialogue dans la société en refusant les remarques haineuses et la construction de figures de l’ennemi au sein du débat public.
Des lignes rouges franchies à de multiples reprises
La commission des Libertés civiles, de la Justice et des Affaires intérieures du Parlement européen (PE) vote cette semaine un texte fort, porté par son Président socialiste espagnol Juan Fernando López Aguilar, à destination du Conseil européen et de la Commission européenne pour alerter sur la situation qui se détériore un peu plus chaque jour en Pologne. Des vies sont en jeu, ne l’oublions pas !
Ce texte porte sur les atteintes à l’État de droit, les atteintes contre les libertés académiques, l’atteinte à la pluralité dans les médias, les attaques contre l’éducation sexuelle, contre le droit à l’avortement et sur les rhétoriques haineuses (déjà) de la campagne parlementaire de 2019…
Une nouvelle période violente pour les LGBTI, les femmes et les minorités en Pologne
Après la réélection de Duda, s’ouvre pour les minorités, les femmes, les Roms, les réfugiés et les LGBTI en Pologne, une nouvelle époque de difficultés sévères. Le discours de haine de la campagne aura sans nul doute renforcé un climat nauséeux et très délétère.
La désignation de boucs émissaires censés expliquer les problèmes de la société polonaise n’est qu’une mauvaise répétition de l’Histoire et elle fait craindre le pire, dans un pays proche du nôtre. En sachant bien que la situation est déjà plus que difficile pour toutes celles et tous ceux que le pouvoir en place a ciblés comme des ennemis de l’intérieur, des dangers pour les enfants, des risques pour la société polonaise ou carrément la civilisation.
L’Europe (UE) et ses dirigeants sont restés bien trop longtemps silencieux et inactifs face à ces situations en Pologne (et aussi en Hongrie). Pour tou·te·s les Polonais·es, encore nombreux.ses, qui considèrent encore que l’UE est une voie d’amélioration de leur vie quotidienne, qui considèrent encore que le progrès, la justice sociale et la liberté ne sont pas de vains mots, il faut parler. Haut et fort.
Pour HES, c’est la responsabilité de la Commission européenne et du Conseil européen de reprendre au plus vite les travaux du Parlement et de les porter politiquement, afin de démontrer à tou·te·s les citoyen·nes de l’Union, leur attachement aux valeurs européennes si souvent proclamées. Au passage, soulignons que le lourd silence du Président Macron et de ses gouvernements successifs est coupable et complice.
Les personnes LGBTI, les femmes, les minorités polonaises ne sont pas seules et ne le resteront pas.