Une évidence que certains ignorent, donc cruciale à rappeler à toutes et tous : un·e enfant victime (à l’école, dans le sport, dans un commerce, dans les transports, avec le voisinage) de racisme, d’antisémitisme saura toujours pouvoir se confier, voire se plaindre, à un ami ou à sa famille ou un autre adulte, notamment parce qu’ils savent et acceptent à priori sa « différence », or ça n’est justement pas le cas pour un·e jeune LGBTI+
Beaucoup continuent de craindre le rejet ou ont une forte présomption d’un possible rejet et de violences, notamment de la part de leurs familles, ce qui induit un malêtre certain. Leur besoin de soutien sûr, aisément identifiable et joignable rapidement est donc crucial pour les jeunes LGBTI+ afin d’éviter mises en danger et risques de dépression voire de suicides (qui sont déjà documentés comme étant 5 fois supérieurs à celui des jeunes hétérosexuels).
- Différents temps de l’enfance à protéger
- Jeunes LGBTI+ et mineur·e·s protégé·e·s : mettre un terme au couperet des 18 ans
- Prévenir et punir le harcèlement scolaire
- #MeTooGay, violences sexuelles
- Prévention de la prostitution des mineur·e·s
Avoir conscience des problématiques inhérentes à la jeunesse est fondamental pour construire un avenir bienveillant et inclusif. Or, les jeunes sont confrontés à des enjeux de construction de soi et c’est le devoir du politique de chercher à créer un cadre social propice à la réalisation des individus.
Les jeunes LGBTI+ font face à une réalité critique, celle qui mêle questionnement, honte de soi, rejet, épanouissement et désir d’accomplissement. En même temps, ils et elles ont le désir de correspondre aux attentes que leur famille, leur cadre socioculturel, leur milieu et toute la société leur renvoient. Tout cela peut se jouer, parfois, sans qu’ils et elles bénéficient d’un soutien suffisant, la jeunesse restant un temps complexe et fragile.
Cette complexité se traduit, par exemple, par un taux de suicide bien plus élevé chez les jeunes personnes LGBTI+, ainsi que le révèlent différentes enquêtes en santé. Les propositions de HES partent du constat que les jeunes LGBTI+ constituent une catégorie sociale, une composante à part entière de la jeunesse. Les politiques publiques doivent donc les prendre en compte et les intégrer aux dispositifs communs. Et à chaque tranche d’âge doit correspondre des actions publiques ciblées et menées en concertation entre l’État et ses organismes et services, et les collectivités territoriales. l
HES propose :
- Une action concertée pour organiser, avec association de jeunes, communautaires et les professionnels de l’éducation et de la santé, la présence d’un soutien et de l’aide nécessaire aux jeunes LGBTI+ aux idées suicidaires.
- S’assurer de la disponibilité pour les élèves des collèges et lycées (publics comme privés) de document d’information sur le soutien et l’accompagnement psychologiques possibles, y compris associatif. Cela passe aussi par des listes de site ou numéro d’urgence affichées dans les lieux de vie et de passage des élèves, et pas uniquement à l’infirmerie, quand celle-ci existe et est ouverte.
- En coordination avec les acteurs associatifs, définir une politique publique de lutte contre l’homophobie, la lesbophobie, la biphobie et la transphobie, à vocation pluriannuelle, si ce n’est pérenne.
L’Aide sociale à l’enfance (ASE) est une mission importante menée par les pouvoirs publics locaux et nationaux, qui mérite des moyens plus importants et une attention des responsables politiques plus grande qu’elle ne les a aujourd’hui. À ce titre la mobilisation des acteurs du secteur a permis de médiatiser les difficultés et les besoins de la protection de l’enfance et a pointé du doigt les défaillances de ce service social de première importance.
Parmi elles, le défaut de suivi et le couperet infligé au 18e anniversaire pour les enfants placés. Et parmi elles aussi, « les violences spécifiquement faites aux enfants et jeunes majeurs LGBTI+ (qui) sont une réalité, significative, à laquelle le droit commun de la protection sociale ne sait pas ou ne veut pas répondre de manière adaptée », ainsi que le soulignait une tribune parue dans Têtu en avril 2021.
C’est à ce titre que l’État est à mobiliser, au sein d’un schéma national impliquant collectivités locales et services nationaux, jusqu’à la majorité afin de faire évoluer les formations des personnes intervenantes dans ce milieu, de pouvoir aussi proposer des accompagnements respectueux et corrects pour l’enfant et la ou le professionnel·le, débarrassés des tabous et des non-dits. Chaque enfant a droit à un suivi et jeune adulte a droit à un suivi pertinent, protecteur et émancipateur qui tienne compte de son orientation sexuelle et de son identité de genre à plus forte raison si ce sont ces éléments-là qui l’ont fait être la victime de violences, de quelque niveau que ce soit.
HES propose :
- Prendre en compte les avis des enfants confiés à l’ASE, dans les décisions qui les concernent.
- Améliorer la formation des éducatrices et éducateurs en contact avec ces jeunes, notamment sur les questions de sexualité et de vie affective afin de pouvoir évoquer avec eux, de manière appropriée des questions parfois complexes à traiter.
- Déterminer un mode de signalement et une gestion effective et efficace pour tous les dysfonctionnements dans les relations entre les agent·es, intervenants et les mineur·es, notamment pour les agressions et violences sexuelles et protéger les enfants, des adultes et des autres mineur·es.
- Définir des financements pour les services de l’ASE qui ne soient pas corrélés en fonction des lieux et départements, mais avec des moyens définis pour chaque enfant protégé.
- Organiser, par une législation adéquate et avec des moyens publics, la fin des « sorties sèches » de l’ASE pour éviter que les jeunes, abandonnés du jour au lendemain, dès qu’ils et elles deviennent majeur·es soient oubliés des institutions.
- Définir et mettre en œuvre une formation des agent·es de la Brigade de protection des mineurs (BPM) et autres services publics de type « enfance en danger », pour accueillir les jeunes LGBTI+ potentiellement victimes de harcèlement, de violences, de menaces/chantages, de coups, de brimades et même d’agressions sexuelles.
Le harcèlement scolaire contre des LGBT, supposés ou réels, a notamment ces 3 dernières années causé des drames humains et des morts d’adolescent·e·s. Presque à chaque fois les services de l’État et les ministères (Éducation nationale, police, justice) n’ont pas su réagir, voire ont eu des attitudes et discours qui continuaient de dénigrer les victimes (par exemple en les mégenrant), avant leur suicide. Le ministre Blanquer aura été sur ce sujet, comme sur tant d’autres, au-dessous de tout.
La spécificité du harcèlement scolaire est qu’il est surtout un harcèlement de groupe/meute (avec meneurs et suiveurs) et se fait également sur des lieux hors institution scolaire avec les 6 c : le Chemin (pour aller et venir en cours), la Classe, la Cour d’école, la Cantine, les Commodités (WC, vestiaires) et les Couloirs. Cela illustre le besoin d’une approche globale, d’une formation et vigilance de tous les adultes (professeurs, conseillers, assistants d’éducation, intervenants) et une éducation de tous les enfants sur ce sujet. (Voir École et enseignement)
HES propose :
- Le renforcement de la formation – initiale ET continue – des professionnels des secteurs sociaux, de la santé, de la Protection maternelle et infantile, du milieu scolaire, du sport, de la Sécurité sociale (Cnaf, CPAM), et de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) pour une meilleure prise en charge de la question LGBTI+, à travers un parcours individualisé, au sein des structures d’accueil destinées à venir en aide aux jeunes en difficulté, notamment en rupture familiale et sans domicile fixe.
- Le développement d’un travail de prévention nationale pour sensibiliser ces mêmes personnels et les familles afin de lutter contre les préjugés et favoriser l’inclusion des jeunes LGBTI+.
- L’ouverture d’une possibilité de médiation familiale quand un·e jeune majeur·e de moins de 25 ans, ou à plus forte raison un·e mineur. e, est en rupture familiale en raison de son orientation sexuelle ou de son identité de genre réelle ou supposée.
- Lancer une étude nationale et renforcer la collecte et remontée précises de la prostitution (régulière ou occasionnelle) de mineur·e·s LGBTI+ sur tout le territoire, notamment via les services et structures recevant des jeunes rejetés par leurs parents, assurer un suivi médicosocial complet bienveillant, un soutien psychologique pour les en sortir des griffes des réseaux illégaux. Renforcer aussi la veille en ligne contre la pédocriminalité et responsabiliser fermement les réseaux détournés pour le recrutement tels Snapchat, Instragram… Il faut aussi avoir une vigilance particulière sur ce sujet pour les enfants placés (Aide sociale à l’enfance/ASE).
- Le soutien aux structures de jeunesse (Centre régional de l’information jeunesse/CRIJ, Centre d’information départemental jeunesse/CIDJ, Point d’information jeunesse/PIJ) présentes sur tout le territoire, aux associations LGBTI+ et aux associations d’éducation populaire afin qu’elles aient les moyens de diffuser des savoirs sur les questions de genre et de diversités sexuelles, cf. affichettes et brochures d’info d’associations reconnues (ex. : SOS Homophobie, MAG-Jeunes LGBT…).
- Renforcer les moyens des « Maisons des Adolescents » (MDA, aux moyens très disparates, financées surtout
par les ARS : quid des collectivités ?), et qu’ils soient dotés d’infos et brochures à jour sur les sujets LGBT. - Informations et prévention accessibles et adaptées aussi aux jeunes LGBTI+ sur les produits addictifs (alcool, cartouches de gaz hilarant/protoxyde d’azote) et drogues, y compris des produits utilisés à des fins sexuelles (cf. « chemsex », stimulants, viagra).
- Incitation puis valorisation d’initiatives des jeunes eux-mêmes dans les programmes de lutte contre les discriminations (LCD). Ex. : sortie culturelle, création d’une expo, d’un spectacle, séjour, citoyenneté… financement possible via « Projet Jeunes ».
La vague de libération de la parole des femmes, et surtout de son écho médiatique, liée au mouvement #MeToo, a permis, par la suite, aux LGBTI+ de pouvoir témoigner aussi des rapports violents, de la réification et des différentes atteintes sexuelles (jusqu’au viol) qu’ils ont pu connaitre.
Les dispositifs qui ont pu voir le jour dans les organisations privées (associations, partis, syndicats), et également au sein des institutions publiques (ministères, entreprises publiques, collectivités locales, milieu hospitalier, lieux d’enseignement et de loisirs, doivent intégrer les paramètres LGBTI+ et leurs spécificités pour appréhender au mieux toutes les questions des violences sexistes et sexuelles au sein des groupements humains.
Ces instances permettront de recueillir, dans un cadre propice, les paroles de victimes et de témoins souhaitant signaler des faits ou discours de haine. C’est au sein de ces instances qu’il faut intégrer des dispositifs solides qui pourront aussi inclure les questions des violences sexuelles chez des homosexuel·le·s, car elles existent y compris au sein de couples de gays et de lesbiennes. Leurs ressorts et enjeux, pour être similaires, ne sont pourtant pas encore pris en compte au niveau attendu. l
HES propose :
- Réfléchir à l’élaboration de cadres de recueil des paroles des victimes en fonction des structures où elles seront mises en place (moyens humains, financiers, forme du recueil). Diffuser les bonnes pratiques qui seront identifiés par les services de l’État ou les associations.
- Élargir le périmètre de la Délégation interministérielle d’aide aux victimes (DIAV, instance nationale), lui donner plus de moyens (avec de vrais relais officiels dans toutes les régions de France, et avec des intervenants pleinement formés) permettant d’évoquer les questions des violences sexistes et sexuelles, dans toutes les structures pertinentes…
Le tardif plan contre la prostitution des mineur·e·s (qui est totalement interdite en France de longue date, à contrario de celles des majeur·e·s), y compris des moins de 15 ans, présenté par le gouvernement sortant mi-novembre 2021 était nécessaire, mais reste très insuffisant. Doté de seulement 14 millions €, il est très faible sur les jeunes LGBTI+ fragiles rejetés, voire expulsés, de leurs familles, et il manque encore une fois cruellement de données sur les jeunes possiblement concernés. Soulignons qu’il s’agit bien ici de pédocriminalité et de trafic d’êtres humains fragiles.
Ce phénomène a d’ailleurs été accru avec les confinements successifs, avec des filières de proxénètes recrutant des très jeunes via des réseaux comme Snapchat, TikTok ou Instagram par exemple, argent facile à la clé. Dans des quartiers populaires des grandes agglomérations, des délinquants se recyclent/diversifient aussi en proxénètes, jugeant cette activité moins exposée et même moins risquée pour eux, activité en hausse de +54 % en 4 ans.
Il existe aussi de la prostitution de mineur·e·s dans des filières de migrant·es réfugié·es, y compris dans des campements précaires, ce qui accroit leurs prises de risques notamment pour leur santé, avec la prise importante de produits addictifs (alcool, drogues) et des tentatives de suicide aussi (dépression, horizon semblant totalement bouché, très faible estime de soi).
Les victimes de ces réseaux sont souvent en rupture familiale, largement déscolarisées, isolées, désocialisées et/ou précaires. Les rapports convergents des ministères concernés parlent d’une affolante « progression » de la prostitution de mineur·e·s « de +70 % » en seulement cinq ans !
On sait aussi que 40 % à 49 % des mineur·e·s ont subi des violences sexuelles durant leur enfance, principalement au sein de leur famille, avant d’entrer dans la prostitution. Important : nombre de ces mineur·e·s ont des difficultés à prendre conscience, à verbaliser et assumer leur statut de victimes prostituées forcées, étant parfois aussi dans un lien de proximité ou presque amical/familial avec leur·s exploiteur·s.
HES propose :
- Continuer à agir pour que les plateformes numériques, aussi bien les réseaux sociaux que les plateformes locatives, travaillent avec les services de l’État pour l’identification des victimes et des organisateurs afin de démanteler ces réseaux.
- Offrir les moyens aux associations qui œuvrent avec les jeunes LGBTI+ pour informer
- sur les risques et proposer des moyens de contact pour signaler ces situations.
- Renforcer les moyens alloués aux services sociaux, en lien avec les collectivités locales, qui font la détection et le suivi des jeunes victimes de violences, notamment LGBTI+ et déjà identifiés.