Grâce à la loi dite « Quéré » (du nom de la députée de Charente-​Maritime qui en fut à l’origine), il n’y a plus de différence de délais de prescription – le temps qu’a la victime pour engager une procédure – entre un acte raciste, un acte antisémite et un acte homophobe. Il convient de veiller à la préservation de cette cohérence de notre droit. Tous les motifs sexistes, antisémites, racistes et « LGBTIphobes » dans les délits et crimes doivent correspondre à une même considération dans les circonstances aggravantes.

La lutte contre les discriminations, c’est, rappelons-​le, la lutte contre l’acte qui consiste à mettre de côté, à maltraiter, à désigner ou à distinguer une personne par sa couleur de peau, son genre, son orientation sexuelle, sa religion, son origine, un handicap, des caractéristiques physiques. Rappelons également que le mot discrimination vient du latin discrimen, qui signifie « ligne de démarcation, point de séparation ».

L’homophobie et la transphobie sont la première cause de suicide chez les 15 – 24 ans. La lutte contre les discriminations doit demeurer un objectif pédagogique qui débouche, notamment, sur l’éducation civique et l’éducation à la santé. La lutte contre les discriminations est aussi un enjeu dans le monde du travail. Les discriminations liées à l’orientation sexuelle se cumulent à d’autres discriminations liées au sexe, à l’état de santé, à l’origine, etc. On le voit, la lutte contre les discriminations est autant une affaire de normes que de sensibilisation, d’éducation, de réflexion.

 

La lutte contre les discriminations est une brique de base du travail politique pour une société qui proclame l’égalité entre ses citoyens. Les premières discriminations qui sont facilement modifiables sont celles qui proviennent des structures publiques et du système politique.

Avec des lois qui mettent enfin à niveau l’ensemble des citoyen·ne·s dans leurs droits, l’accès concret à ces droits est la première étape d’un long processus. Cela débute aussi par la mise à jour des documents, des formulaires que toutes les administrations proposent pour une démarche d’accès à des droits ou pour des réalisations d’actes.

Mais il faut aller plus loin et organiser, politiquement, la lutte contre les discriminations.

En France, comme le prévoient les textes européens, un organisme national indépendant travaille dans le domaine de lutte contre les discriminations, la Défenseure des droits. Elle a remplacé la Halde en 2011 (La Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, créée en 2004). Inscrite dans la Constitution, elle s’est vu confier deux missions : défendre les personnes dont les droits ne sont pas respectés ; permettre l’égalité de tous et toutes dans l’accès aux droits. Toute personne physique, ou personne morale peut le saisir directement et gratuitement. L’actuelle Défenseure des droits est Claire Hédon, nommée par Emmanuel Macron en 2020, à l’issue d’un mandat de 6 ans (unanimement salué par les associations de défense de droits humains) de Jacques Toubon, nommé en 2014 par François Hollande.

La Défenseure des droits a lancé en 2021 une plateforme en ligne : antidiscriminations​.fr. sa mise en place est aussi un moyen technique à exploiter pour tenter de photographier notre pays. Il faut en tirer des statistiques sur la place des discriminations dans la société française – tout en tenant compte du fait qu’il ne s’agit, comme chaque fois, que de signalements, et non de la situation réelle. Cette prise en compte de la réalité et de l’envergure des discriminations qui ont cours dans notre pays est fondamentale. C’est une nécessité pour cesser de considérer comme neutre les discours qui, en refusant des droits, celui du mariage, celui de la PMA, celui de l’adoption, ne serait pas homophobe ou discriminatoire. Ou que prononcer simplement le mot de violences policières deviendrait une attaque contre la République… Plus globalement, il importe que tous les travaux menés par ce que l’anglais désigne comme les equality bodies (Défenseure des droits, mais aussi Dilcrah, l’Agence des droits fondamentaux de l’UE, etc.) soient pris en compte par la force publique. En s’appuyant sur leurs différents champs de compétences, qu’ils proviennent des institutions internationales, notamment celles de l’UE ou de structures nationales, c’est un nouveau rapport politique au sujet des discriminations qui doit être enclenché. Il faut cesser de laisser aux réactionnaires et aux conservateurs, un magistère moral sur un sujet qu’ils dénigrent parce qu’il affaiblirait notre corps social.
Car c’est bien le cas, les discriminations minent notre société. Ce qui crée le problème, ce n’est pas d’en parler, c’est vouloir le mettre dans la poche, recouvert par un pudique mouchoir.

HES propose :

  • Renforcer les moyens financiers et humains pour les institutions qui agissent dans le champ des LCD, notamment Défenseur des droits et Dilcrah
  • Concrètement, faire de la Dilcrah une autorité indépendante, avec un budget et des moyens humains (actuellement quelque 20 personnes pour toutes ses missions, dont également la lutte contre le racisme et l’antisémitisme) considérablement accrus et pérennes. Son conseil d’administration, au sein duquel les associations de lutte contre les discriminations (racisme, sexisme, LGBTIphobie, antisémitisme, islamophobie, antirom) seront présentes, permettra une démarche et l’établissement de stratégies en dehors du strict calendrier gouvernemental. Aujourd’hui, le budget de la Dilcrah dédié aux sujets LGBTI+ est de seulement 1,5 million € par an, le passer au moins à 20 puis 35 millions € par an à mi-​mandat (la gauche allemande – arrivée récemment au pouvoir – s’est engagée à mettre sur la table… 70 millions € par an)
  • Améliorer la loi autorisant les actions de groupe en matière de lutte contre les discriminations et renforcer les instructions aux services du parquet pour éviter la méconnaissance des mécanismes de preuves de discrimination, ou plus encore des discriminations en tant que telles.
  • Donner un écho plus grand et se saisir des travaux de la CNCDH dans sa composition actuelle, assemblée des représentants des ONG françaises de défense des droits de l’Homme, qui formule des avis approfondis et argumentés aptes à élever le débat public. Ses avis doivent être systématiquement intégrés dès l’étude d’impact dans notre processus législatif, y compris pour transcrire une directive européenne.
  • Conditionner toute aide publique à des associations ou entreprises à de bonnes pratiques en matière de lutte contre les discriminations.
  • D’améliorer les possibilités d’interventions des associations spécialisées dans les établissements scolaires et d’en faire une politique nationale, dirigée par l’Éducation nationale.
  • D’intégrer dans les initiatives d’aide à la parentalité, l’aide à la préparation d’un environnement serein, y compris pour les jeunes LGBTI+.
  • De pérenniser et d’approfondir la formation des professionnels de la police, de la justice et de la santé à l’accueil des victimes, notamment d’actes anti-​LGBTI. (Voir Justice et Police
  • De mettre à l’étude des processus d’accueil des victimes qui ne les enferment pas dans le rôle de victime, mais, au contraire, qui les aident à reprendre la main sur leur existence. Ce travail peut se faire dans un premier temps à l’aide de la plateforme internet publique « stop discrimination » et de celle du Défenseur des droits.
  • Tirer des statistiques et indicateurs probants pour les démarches de lutte contre les discriminations en utilisant la plateforme antidiscriminations​.fr lancée par la Défenseure des droits.

Lutter contre la sérophobie, tristement habituelle encore aujourd’hui en dépit des campagnes d’information sur le VIH-​Sida, sur les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) et sur les avancées scientifiques qui permettent une vie affective et sexuelle banale reste un impératif. La hausse des contaminations durant la période suivant les confinements, la précarisation des personnes malades et des PVVIH, discriminations d’un autre âge, telle est encore aujourd’hui la réalité du VIH-​Sida en France.

Rappeler une évidence : une personne sous traitement ne transmet pas le virus !

Dans la stratégie de lutte contre le VIH-​Sida, plusieurs modes de protection existent et certains ont permis de renforcer la prévention. Le Tasp (Treatment as prevention : traitement comme prévention) et la Prep sont les outils clés pour casser enfin l’épidémie. (Voir Santé et prévention)

Avec la stratégie I = I, indétectable = intransmissible (U = U, undetectable = untransmittable, en anglais) c’est la démonstration qu’une relation sexuelle avec une personne qui a accès aux traitements et peut l’observer correctement n’est plus un risque. Le message de la stratégie I = I est utile pour favoriser l’accès aux dépistages, il ne faut pas oublier que les nombreuses et consternantes idées reçues sur le VIH-​Sida, les discriminations qui frappent les PVVIH sont des freins à l’accès aux soins et constituent des obstacles à la lutte contre l’épidémie.

À ce titre, les différentes itérations d’un texte gouvernemental ont empêché, pendant plus d’un an, la délivrance de la PrEP, par prescription initiale, en médecine de ville (donc les médecins généralistes), un amateurisme affligeant et dangereux.

Lutter contre la sérophobie

Ce premier message de prévention est une nécessité pour que les enjeux de représentation des personnes séropositives changent. À la fois pour que les discours et les actes discriminants cessent et pour que la réalité des vies des PVVIH s’impose comme une banalité tranquille qu’il faut reconnaitre.  Le travail de déconstruction des préjugés et des fausses informations (les « fake news »… qui ne sont pas seulement sur internet et les réseaux sociaux) reste aussi entier.

Les idées fausses encore trop répandues, et pour certaines regagnant du terrain à l’aune de la diffusion de fausses informations, de délires complotistes et de peurs infondées sont les meilleures alliées du VIH-​Sida et contribue à l’ignorance sur le sujet. Une ignorance qui conduit à la peur, voire à la haine, envers les PVVIH contribuant à générer une image fausse et éculée de l’épidémie et de la santé des séropositifs en 2021.

Aides, la plus importante association européenne de lutte contre le VIH-​Sida, a lancé la journée contre la sérophobie le 24 avril 2021. Cette journée doit permettre, à l’avenir d’obtenir des pouvoirs publics des changements dans les dispositions légales ou règlementaires pour améliorer la vie des PVVIH et continuer de construire une société inclusive. (Voir, notamment, Santé et prévention, Finances et Assurances)

Entre les avancées médicales, les modes de prévention, les informations erronées qui continuent de circuler et la représentation à changer, la lutte contre la sérophobie ne manque pas de travail. Mais cela devra se continuer aussi dans les textes et dispositions légales qui continuent de concerner les PVVIH, tant dans le domaine médical que dans la vie de tous les jours, pour la finance, les assurances… Des sujets qui sont de vrais problèmes parfois pour se projeter, travailler, avoir des perspectives tant personnelles que familiales, bref mener son existence comme n’importe qui.

HES propose :

  • Il est important que l’État et ses services confirment leurs soutiens aux associations qui agissent sur le terrain aux côtés des publics ciblés, des séropositifs, des malades et leurs proches… La lutte contre la sérophobie (la peur, le rejet, le dégout des personnes vivant avec le VIH-​Sida) n’est pas accessoire et reste une démarche essentielle de fraternité, pour combattre les peurs et les préjugés, et réaffirmer que c’est le VIH qu’il faut exclure, pas les personnes vivant avec.
  • Diffuser, reprendre et créer des campagnes d’information et de santé publique sur le sujet, car elles sont les premières sources pour reprendre la main sur les discours erronés et sur les personnes rétives à voir la réalité du VIH d’aujourd’hui, et des PVVIH.
  • Soutenir et faire endosser aux structures publiques, y compris commerciales, le soutien aux journées d’action autour de la lutte contre le VIH-​Sida, en décembre et mars.

Pour une politique efficace et assumée de lutte contre les discriminations, il est conseillé qu’un portefeuille ministériel majeur intègre – et qu’une délégation au sein des structures publiques le permettant – explicitement cette dimension. Elle peut, par exemple, compléter un portefeuille, notamment celui travaillant sur les droits humains, la lutte contre les discriminations (LCD)…

La transversalité évidente des sujets LGBTI+ doit amener toutes les délégations à travailler et abonder des budgets ensemble, en lien avec celle chargée des LGBTI+ (social, santé, culture, sport, jeunesse), pour éviter une action trop réduite et atomisée. La délégation pourra alors être un véritable aiguillon sur ses sujets, permettant d’avancer concrètement et poussant toutes les autres à penser et intégrer les dimensions LGBTI+ dans leurs actions et leurs travaux.

HES propose :

  • Un portefeuille ministériel avec rang de ministre d’État, dédié, qui mentionnera explicitement la lutte contre les discriminations et intègrera les sujets LGBTI+. Avec un budget conséquent et des agents publics de ministère en nombre et représenté sur tout le territoire du pays (NB : la Dilcrah compte seulement une vingtaine d’agents, dont seulement deux s’occupent des sujets LGBTI+).
  • Afin de coordonner les différentes actions qui seront menées, et de donner de la visibilité à la volonté politique qui les inspire, HES demande qu’un·e ministre spécifique soit nommé·e responsable de l’élaboration et du suivi des objectifs du mandat dans le domaine de la LCD et des luttes contre les LGBTIphobies.