Une nouvelle fois, l’ILGA-Europe classe la France à une plus mauvaise place que l’année précédente. 10ème en 2023, la France finit à la 13ème place cette année avec un taux de remplissage des critères à seulement 62 % (contre 63 % l’année dernière). A l’approche des élections européennes, ce résultat vient de nouveau pointer du doigt l’absence de prise en compte sérieuse des questions LGBTI+ par les différents gouvernements des quinquennats Macron.
Chaque année, l’ONG ILGA-Europe (la branche européenne de l’International Lesbian, Gay, Bisexual, Trans and Intersex Association) publie son classement des États en Europe pour les droits des personnes LGBTI+. Elle examine les lois et politiques de 49 pays en utilisant 75 critères, répartis en 7 catégories thématiques : égalité et non-discrimination, famille, lutte contre les discours et crimes de haine, reconnaissance juridique du genre, intégrité corporelle des personnes intersexes, place accordée à la société civile, droit d’asile.
L’ensemble des critères qu’elle fixe pour son classement permet à chaque pays d’obtenir un pourcentage de remplissage. Le premier pays de ce classement, Malte, en remplit 88 % alors que la France (seulement en 13ème place) atteint un trop faible 62 %.
1) Sous Macron, penser communication avant de penser action, tel semble être le seul leitmotiv
Sous la Gauche entre 2012 et 2017, le taux de remplissage avait constamment augmenté et la France avait même atteint le top 5.
Depuis, à l’exception de l’année ayant suivi l’adoption de la PMA, la France n’a eu de cesse de chuter au classement et les quinquennats Macron sont marqués par un nivellement par le bas : la France s’est retrouvée 9ème, puis 13ème deux années durant et à la 10ème place l’année dernière avant de chuter de nouveau cette année. L’absence de nouvelles législations – notamment depuis le second quinquennat – est criante.
Depuis 2022, en deux ans, trois Ministres se sont succédés au portefeuille de l’égalité et/ou de la lutte contre les discriminations : la continuité des politiques publiques en la matière s’en trouvant de fait amoindrie.
Le nouveau plan de lutte contre la haine anti LGBT+ a été annoncé en juillet dernier par une Ministre sur le départ, sans attendre l’évaluation du précédent plan, et sans budget à la hauteur de grands pays proches comparables. Les associations LGBTI+ ont elles même dénoncé l’absence de concertation et du suivi du plan, plan qui par ailleurs reprend beaucoup de mesures du précédent et manque cruellement d’ambition, notamment en ce qui concerne les personnes trans et intersexes. Les violences et les actes LGBT-phobes se sont multipliés cette année, actes face auxquels les Ministres se sont la plupart du temps montrés silencieux. Il aura fallu un courrier interassociatif adressé au Premier Ministre pour que le Ministre Darmanin réagisse aux trop fréquents et violents guet-apens homophobes qui s’organisent via la plateforme « Coco » et que la Ministre Bergé reçoive certaines associations LGBTI+. Des prises en compte des sujets LGBTI+ qui s’obtiennent aux forceps et qui pour l’instant ne ressemblent qu’à des opérations de communication de circonstance et du pinkwashing saisonnier.
La nomination pour la première fois en France d’un Premier Ministre ouvertement homosexuel ne peut masquer la présence de tant de Ministres au passé ouvertement homophobe et transphobe (déclarations, manifestations, votes). La première d’entre elle étant la Ministre en charge du portefeuille concerné, Aurore Bergé, qui s’est opposée au mariage pour tous et a eu des engagements clairs contre les personnes trans. Rachida Dati, opposée à la PMA et à la lutte contre les thérapies de conversion et Catherine Vautrin, militante de la Manif pour Tous (LMPT), viennent rejoindre Béchu, Darmanin et Lecornu. Quant à la Ministre des Sports – ex éphèmère Ministre de l’Education Nationale – Amélie Oueda-Castera qui scolarise ses enfants dans une école privée religieuse à l’univers sexiste et homophobe, elle aura du mal à nous persuader qu’elle peut être porteuse de politiques publiques inclusives pour les personnes LGBTI+. Pourtant, il y aurait beaucoup à faire pour lutter contre les LGBTI-phobies et les stéréotypes de genre dans le sport, particulièrement l’année où la France accueille les Jeux Olympiques et Paralympiques.
Ce second mandat est placé sous le signe du recul pour les droits humains (la loi asile-immigration, votée en se soumettant aux fantasmes du RN et des LR, en est une des preuves flagrantes) tout comme les récentes déclarations de Macron sur la politique familiale nataliste nous laissent présager une deuxième partie de mandat au mieux sous le signe de l’atonie.
Mais cette absence totale de concertation, de réflexion de fond et de vision pour l’égalité des droits LGBTI+ et la lutte contre les discriminations se retrouve très explicitement dans ce nouveau classement. La France y est encore largement dépassée par ses voisins : l’Espagne, la Belgique et le Luxembourg. Malte, elle, continue de faire la course en tête, avec 88 % de critères remplis.
Le classement 2024 de l’ILGA-Europe illustre le manque cruel de politiques publiques ou de textes légaux permettant de faire évoluer les droits LGBTI+ en France, et de lutter correctement contre les discriminations et les violences LGBTIphobes et il montre une nouvelle fois la défaillance évidente de la France sur les droits des personnes transgenres et intersexes.
Sur ces deux sujets, les mandats de Macron n’ont tout simplement été synonymes d’aucune avancée majeure : changement de mention de sexe à l’état civil toujours judiciairisé alors que d’autres pays ont récemment simplifié la démarche (Espagne, Allemagne…) et les mutilations chirurgicales à la naissance des enfants intersexes ne sont toujours pas formellement interdites. Les propositions de législation venues de la droite sénatoriale sont aujourd’hui un signe qu’après s’être opposée au PACS, au mariage et à l’adoption pour tous ainsi qu’à la PMA, la droite reprend le chemin de la violence institutionnelle et législative envers les personnes trans : une parfaite illustration de sa propension à recycler la haine et les polémiques stériles propagées par les extrêmes droites…
2) En Europe, les droits LGBTI+ comme marqueur politique fort
Malte reste depuis 9 ans en tête de ce classement de 49 pays, mais cette première place ne doit pas nous faire oublier que le droit à l’avortement n’y est toujours pas reconnu et que cette situation demeure inacceptable en 2024.
L’Allemagne, l’Islande, l’Estonie, le Liechtenstein ont réalisé des bonds au classement grâce à des avancées législatives significatives. L’Estonie a récemment modifié ses lois pour permettre aux couples de même sexe de se marier et d’adopter des enfants et le Liechtenstein a enfin étendu le droit d’adoption aux couples de même sexe.
A quelques semaines des élections européennes du 9 juin, cette Rainbow Map démontre de manière évidente que les droits LGBTI+ sont un marqueur politique fort. L’extrême droite et les mouvements des droites réactionnaires essaiment et s’en prennent en premier lieu aux personnes LGBTI+, comme nous le voyons dans l’Italie dirigée par Giorgia Meloni où plusieurs autorités locales sont sommées de retirer le droit de parentalité aux couples de lesbiennes, ou dans la Hongrie de Victor Orban qui ne cesse d’adopter des mesures anti droits copiées-collées de la Russie de Vladimir Poutine. Lors de l’unique tour du dimanche 9 juin, il est donc impératif d’envoyer au Parlement européen des élu.e.s pro-actifs sur les questions LGBTI+, comme celles et ceux présent·es sur la liste PS-Place Publique.
Bien que la Pologne soit classée dernière dans l’UE par l’ILGA pour ce classement, HES tient à saluer les nombreux engagements de la toute nouvelle coalition au pouvoir qui compte tourner la page sombre du PiS (allié de Zemmour) qui avait fait des LGBTI+ un totem idéologique à abattre.
Ce classement annuel de l’ILGA est une nouvelle fois la preuve que quand la volonté politique est là – et très souvent dans les pays où la gauche gouverne – les droits LGBTI+ progressent.
A HES, nous sommes convaincus qu’une des réponses aux mouvements réactionnaires est justement la capacité de la gauche à proposer des politiques publiques qui contribuent au mieux vivre ensemble, notamment en faisant avancer les droits des minorités sexuelles et/ou de genre.