Cette semaine, élèves et personnels de l’Éducation nationale ont fait leur rentrée scolaire. Après une année marquée par une vague de harcèlement LGBTIphobes, avec de vrais drames, et par la toujours quasi absence de politiques d’éducation aux sexualités et de santé sexuelle efficaces, qu’adviendra t‑il cette année  des sujets d’inclusivité et de la vie des jeunes LGBTI dans l’Education nationale ? 

Lutte contre le harcèlement scolaire : de la parole aux actes ?

Alors que les préoccupations du nouveau Ministre de l’Education Nationale, Gabriel Attal, semblent surtout tournés vers les tenues vestimentaires, quelques chiffres viennent dire la la réalité de l’école aujourd’hui : d’après le rapport de la mission d’information sur le harcèlement et le cyberharcèlement du Sénat publié en 2021, 6 à 10 % des élèves subiraient une forme de harcèlement au cours de leur scolarité et un quart des collégiens serait confronté à du cyberharcèlement. Chez les (futurs) LGBTI+, des symptômes dépressifs sont susceptibles de se manifester dès l’âge de 10 ans et des études ont établi un lien entre la sursuicidité (taux de suicide plus haut que la moyenne) des personnes LGBTI+ et le harcèlement, les humiliations et les violences vécus à l’école. Le harcèlement des adolescentes est un facteur de stress chronique qui peut augmenter le risque de suicide et le statut de minorité – assumé ou perçu comme tel – entraîne une discrimination accrue de la part de l’environnement social (famille, quartier, école) et des problèmes de santé plus importants (lire à ce sujet le rapport de santé publique France)

 La parole publique sur  la vie des jeunes LGBTI+  ne peut pas se limiter à des discours aussi empreints soient-​ils d’une émotion sincère aux moments de drames, elle doit pouvoir s’incarner dans des politiques pédagogiques concrètes. La lutte contre les stéréotypes de genre et les discriminations est indispensable dès le plus jeune âge, par exemple dans le sport où les moqueries – qui peuvent se manifester sous forme de stéréotype genré – contribuent à l’isolement et au mal être des jeunes LGBT.

Des campagnes d’affichage de prévention et la mise à disposition de numéros de téléphone d’écoute dans les lieux de vie des jeunes et au sein de leurs établissements doivent être généralisées. Le Plan national pour l’égalité, contre la haine et les discriminations anti LGBT annoncé début de l’été prévoit dès 2024 d’enrichir les ressources du programme pHARe sur la prévention des LGBTphobies afin de mieux former les équipes et les élèves ambassadeurs et la mise en place d’adultes référents au sein du personnel éducatif de chaque collège et lycée. Nous serons attentifs à la mise en œuvre de ces mesures dans les prochains mois.

Par ailleurs, la circulaire Blanquer du 29 septembre 2021 visant à une meilleure prise en compte des transidentités à l’école doit pouvoir faire l’objet d’un suivi dans sa mise en application et l’utilisation du prénom choisi par l’élève doit pouvoir se faire de manière plus systématique par des équipes pédagogiques mieux formées, pour le bien être des jeunes élèves trans.

Prévention et santé sexuelle ; tout est à (mieux) faire !

Dans un rapport publié en 2018, Le Défenseur des droits regrettait que la communauté éducative soit encore trop peu sensibilisée à ces sujets et que l’éducation à la sexualité se réduise encore trop souvent à une information sur la contraception ou à une prévention des maladies sexuellement transmissibles. Le Défenseur des droits recommandait alors  la mise en place un plan d’action comprenant une formation des personnels et la mise en place d’un cadre de référence en matière d’éducation à la sexualité.

Il faut donc qu’une évaluation, indépendante des services du ministère, puisse évaluer  l’effectivité des « 3 séances annuelles » (déjà insuffisantes) d’éducation sexuelle en cours réguliers sur tout le territoire.

Dans ces cours, nous sommes favorables à ce que soient intégrées sans tabou et de manière déconstruite, les différentes orientations sexuelles et identités de genre, sans cantonner les contenus des cours d’éducation sexuelle et affective à la seule biologie, aux questions de reproduction ou de santé sexuelle, mais aussi aux relations affectives, au consentement et aux rapports de domination.

De plus, la prise en charge sanitaire nécessite que les moyens dévolus aux infirmeries scolaires soient révisés à la hausse et que leur parcours de formation soit davantage inclusif avec une prise en compte des publics LGBTI.

La rentrée scolaire marque aussi le début d’une nouvelle année militante pour les associations qui interviennent en milieu scolaire et qui font tant au quotidien pour lutter contre les préjugés, les discriminations, le harcèlement et dont les actions mériteraient d’être mieux accompagnées par les services de l’Etat .

L’école ne continue pas la vie de famille, elle inaugure et prépare la vie des sociétés” disait Jean Jaurès, il y a plus d’un siècle. 

En tant que socialistes, nous croyons en l’école comme lieu d’émancipation, d’apprentissage de la vie en collectivité, promesse d’une société qui donne à chacun⸱e le droit d’être soi. 

Belle rentrée 2023 à toutes et tous !