80e CONGRÈS DU PARTI SOCIALISTE CONTRIBUTION DE HES LGBTI+
La définition la plus largement utilisée d’une personne réfugiée est donnée par l’article 1 de la Convention de 1951 sur les réfugié.e·s : une personne qui « craignant avec raison d’être persécuté pour des raisons de religion, nationalité, d’appartenance à un certain groupe social ou d’une certaine opinion politique, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se prévaloir de la protection de ce pays ». Cette définition a été élargie dans certains traités – y compris la Convention de 1969 de l’Organisation de l’unité africaine, la Convention de 1984, la Déclaration de Carthagène (Amérique latine) et les Déclarations de 2004 et 2004 de l’Union européenne (UE) Directives de qualification de 2011 – pour inclure les personnes souffrant de persécution pour d’autres motifs et celles fuyant la violence généralisée, comme la guerre ou l’insurrection armée.
La politique relative aux réfugié.e·s diffère de la politique d’immigration ordinaire à 2 égards. Premièrement, dans les pays à revenus élevés, le flux d’immigration se concentre sur 2 groupes : les personnes ayant des liens familiaux avec le pays d’accueil (comme c’est souvent le cas en Italie, en Espagne, au Japon, en Israël et aux États-Unis), ou les personnes censées répondre à des conditions de travail et critères du marché spécifiques (ex : système de points au Canada et en Australie, ou le système américain de visa H‑1B).
Les politiques d’immigration peuvent être interprétées comme servant les intérêts de la population du pays d’accueil, qu’il s’agisse d’individus spécifiques tels que les parrains de ceux qui viennent dans le cadre du regroupement familial, ou de l’économie au sens large comme dans le cas de la migration de main-d’œuvre sélective en fonction des compétences. En ce qui concerne les réfugié·e·s demandeurs d’asile, l’unique critère est un « bien-fondé de crainte de persécution » qui est spécifique à chaque réfugié et ne dépend pas de la « valeur » de cette personne pour le pays d’accueil. La raison d’être de la société d’accueil pour fournir un refuge sûr aux réfugiés est beaucoup plus indirecte : la préoccupation humanitaire. C’est à ce conflit entre utilitarisme et humanitarisme que la France est exposée.
La Convention sur les réfugiés de l’ONU (UNHCR 1951) comprend 3 éléments interdépendants, qui ont façonné la politique des réfugiés jusqu’à présent. Tout d’abord, un État signataire doit proposer une procédure pour évaluer si chaque individu déposant une demande est admissible ou non en tant que réfugié selon la définition de la Convention selon laquelle il se trouve en dehors du pays d’origine de cette personne et a une « crainte fondée de persécution » (article 1). Deuxièmement, si le fait d’être sur le territoire d’un pays (ou à la frontière) ne garantit pas en soi l’accès au processus, ce que l’on appelle la clause de non-refoulement (article 33- 1) interdit de renvoyer une personne dans un lieu où sa vie ou sa liberté seraient menacées. Troisièmement, l’entrée ou la présence illégale dans le pays ne préjuge pas de l’admission à la procédure de détermination du statut de réfugié ou de l’issue de cette procédure (article 31). En outre, si la Convention ne prévoit pas le droit à la résidence permanente, elle encourage les pays d’accueil à « faciliter l’assimilation et la naturalisation des réfugié·e·s »(article 34). Ce sont ces trois principes que le France doit réintroduire dans sa politique d’accueil des réfugié.e·s.
La République française sous Macron n’a guère d’honneur à faire valoir dans sa manière d’envisager d’une part les flux migratoires – que toute société connaît depuis la nuit des temps – et la prise en charge peu républicaine des personnes « en situation irrégulière ». Il importe d’avoir une refonte complète de nos politiques migratoires qui ne cherchent pas à courir derrière l’extrême droite, ne reposent pas sur des fantasmes et qui cherchent à gérer des phénomènes naturels et humains, en privilégiant l’humanitarisme à l’utilitarisme.
Nous proposons de :
- Renforcer les filières légales déjà existantes, avec les services consulaires, pour traiter correctement les demandes d’asile déposées dans les pays d’origine ou de traversée. Et, en plus, organiser la création de filières – reconnues légalement – pour des demandes d’asiles, dans des pays ou des régions sans service consulaire français ou européen. Cette organisation reposerait sur les liens construits avec des associations locales reconnues et qui travaillent déjà parfois avec des ONG supranationales, ou des services diplomatiques ou culturels,
- Déterminer des filières d’asile et de migration reconnues légalement, en dehors des cadres diplomatiques gouvernementaux. L’exemple afghan de 2021 avec la fermeture de la presque totalité des ambassades des pays européens et occidentaux a conduit à une impossibilité pour les demandeurs d’asile de pouvoir faire leurs demandes dans les cadres « réglementaires »,
- L’intégration, dans les travaux du Bureau européen, d’appui en matière d’asile de ces persécutions, en particulier pour développer des formations et collecter de l’information sur les pays d’origine.
- Abroger la liste et mettre un terme à la notion de « pays d’origine sûrs » utilisée par le système de gestion des demandes d’asile en France,
- En cas de situation de crise, étendre la référence ou l’autoréférence pour les visas humanitaires aux organisations de la société civile (OSC) avec parrainage communautaire et plus généralement les OSC vers la création d’un visa humanitaire,
- Organiser les liens avec un programme de parrainage communautaire afin d’offrir des soutiens appropriés et une voie garantie vers un statut permanent pour les réfugié·es,
- Travailler à mettre un terme à l’idée répandue selon laquelle l’octroi du statut de réfugié basé sur l’orientation sexuelle, identité ou expression de genre, et sexe biologique fonctionne comme un facteur d’attraction qui conduit à une augmentation des demandes d’asile frauduleuses.
En ce qui concerne les refugié.e·s LGBTI+, près de 70 États membres des Nations unies (ONU) criminalisent les actes sexuels consentis entre personnes de même sexe par la loi ou de facto. Six États imposent la peine de mort, et des sources indiquent que la peine de mort peut être prescrite dans cinq autres États, mais avec moins de certitude juridique. De graves persécutions et discriminations de la part d’acteurs étatiques et non étatiques continuent de contraindre les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres et intersexes (LGBTI+) – y compris les enfants, les adolescents et personnes âgées, personnes handicapées – de quitter leur lieu de résidence habituelle à la recherche d’un endroit sûr, d’un environnement dans lequel ils peuvent exercer pleinement leurs droits.
Beaucoup sont obligés de quitter leur pays à la recherche d’un environnement plus sûr. Dans leur parcours migratoire, les réfugiés LGBTI+ peuvent arriver dans des pays où ils sont confrontés à des risques similaires ou plus élevés de violence homophobe, biphobe, transphobe et interphobe de la part des ressortissants du pays d’accueil ainsi que d’autres personnes déplacées. Ces risques sont exacerbés par d’autres facteurs, tels que l’hostilité xénophobe, la misogynie, le statut migratoire irrégulier, la marginalisation socioéconomique, l’isolement des réseaux de soutien traditionnels et la contrainte physique et émotionnelle induite par un traumatisme.
Ainsi, il est important de rendre les procédures d’asile aux frontières et plus rapides ainsi que plus appropriées pour les personnes LGBTI+ et les autres personnes déplacées, en évitant les procédures d’asile excessivement longues (au lieu de garantir des entretiens principaux et de premières décisions rapides sur les demandes d’asile), sans nuire à la qualité des décisions.
Les personnes LGBTI+ sont souvent confrontées à des obstacles distincts et complexes à la protection nationale et internationale, ainsi qu’à des risques plus élevés pour leur sécurité. Compte tenu de l’expérience et des connaissances des acteurs de la société civile, en particulier des organisations intégrant des réfugiés LGBTI+, il existe un vif intérêt pour participer à l’élaboration d’un visa humanitaire spécialisé et accessible qui inclurait les réfugiés LGBTI+ et leurs familles.
En ce qui concerne l’accès aux moyens de subsistance, l’inclusion économique et le droit légal au travail, les personnes LGBTI+ ont des difficultés d’inclusion sociales et économiques. Il est essentiel de soutenir la mobilisation de ressources pour des programmes ciblés qui faciliteront l’inclusion sociale et économique des personnes déplacées LGBTI+ dans des communautés d’accueil dans les pays d’asile. De plus, les personnes LGBTI+ en déplacement forcé sont confrontées à des défis à la fois structurels et logistiques pour accéder aux services de santé mentale et psychosociale et à d’autres services de réadaptation.
Les programmes de réadaptation suite à des actes de torture doivent être accessibles aux réfugiés LGBTI+. En ce qui concerne l’accès à la reconnaissance juridique du genre, les processus d’asile doivent être sensibles aux personnes transgenres et non genrées, et aux différences juridiques dans la reconnaissance de l’identité de genre entre leur pays d’origine et le pays d’accueil.
Traiter les petites organisations qui travaillent avec les personnes déplacées et apatrides LGBTI+ comme les leaders et la base de connaissances sur le sujet, en veillant à ce qu’elles soient en mesure de mettre en place une programmation et une stratégie durables grâce à l’accès au financement, non seulement par le biais de fonds pour les droits humains, mais aussi d’autres mécanismes budgétaires.
Si un des projets de la France est de promouvoir les droits fondamentaux notamment contenus dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme – dont les droits LGBTI+ – dans les relations internationales, et donc de reprendre la lutte pour la dépénalisation universelle de l’homosexualité, la diplomatie française trouve ses limites dans les usages internationaux à cause de la notion « d’ordre public international ». Un des défis est de faire cohabiter le réalisme diplomatique et économique avec la question des droits humains. C’est une des obligations éthiques qu’une société qui se veut démocratique devra remplir.
Nous proposons de :
- Créer de places d’hébergement spécifiques permanentes pour les demandeurs d’asile LGBTI+ ainsi que la création d’une formation à destination du personnel social accompagnant ce public. Cette organisation peut être liée à des conventions avec les associations dont c’est le travail pour opérer cette mise à l’abri d’urgence et le travail d’accompagnement social avec les services de l’État et des collectivités,
- Protéger les personnes trans persécutées ou en demande de soins médicaux inaccessibles dans leur pays d’origine sollicitant le droit d’asile en France,
- Réformer complètement la notion et liste de pseudos « pays sûrs » pour des réfugiés LGBTI : ladite liste doit être commune à plusieurs pays (notamment européen, démocratiques et réputés « avancés » sur les droits LGBTI+), mise à jour quasiment en temps réel en fonction des orientations des politiques des pays et être construite avec des ONG LGBTI+, reconnues au plan international (ex. : ILGA-Europe, Amnesty…). La reconnaissance des persécutions fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, réelle ou supposée, comme le prévoient les textes de l’Union européenne,
- Former aux sujets LGBTI+ les agents des autorités d’asile et les traducteur.rice·s à évoquer correctement la vie intime des LGBTI+ ,
- Mettre en place dans chaque ambassade et consulat de la France au moins un·e référent·e formé·e aux demandes d’asile invoquant les droits humains (droits des femmes, des minorités ethniques ou religieuses, des LGBTI+) facilitant l’accès à notre territoire en lien avec des ONG,
- Fournir un soutien matériel accessible aux organisations locales de la société civile (ONG) pour les personnes LGBTI+ confrontées à un déplacement forcé,
- Soutenir une orientation et une formation professionnelles obligatoires et continues pour tous les personnels concernés du Haut-commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR), de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), des agences gouvernementales (Ofpra, CNDA, préfectures, centres de rétention…), ONG, agents de sécurité et sous-traitants ayant affaire à des personnes déplacées LGBTI+,
- Établir et mettre en œuvre régulièrement des protocoles Safe Space, et un processus d’orientation ciblés sur les réfugiés pour tous les centres d’accueil gérés par l’État qui accueillent les personnes déplacées LGBTI+, que ce soit au sein de la population générale de réfugiés/demandeurs d’asile, ou dans des installations ciblées,
- Encourager la collecte de données sur les expériences des réfugié·es LGBTI+. Les statistiques et remontées officielles, sur la base de données recueillies par les associations ou agences publiques, restent en deçà des besoins,
- Réformer notre droit pour une reconnaissance légale du genre par autodétermination pour toutes les réfugiées, demandeur·se·s d’asile et autres personnes déplacées sur leur territoire,
- Créer des voies d’admission et protection fondées sur les droits humains pour les personnes transgenres et non genrées présentant des risques de persécution particulièrement aigus et/ou des profils de vulnérabilité accrus,
- Veiller à ce que les réfugiés LGBTI+ puissent accéder en toute sécurité et dignité à des aides et des opportunités de travail décentes en droit, comme en pratique,
- S’engager avec un large éventail d’acteurs du marché du travail et assurer le financement d’une programmation sur mesure visant à promouvoir l’inclusion économique durable des déplacés LGBTI+ sont confrontés doivent être pris en considération.
Les signataires :
- ABDOURAZAKOU Niswat, Seine-Maritime,
- ARSAC Sam, FFE,
- BÉQUET Patrick, Ille-et-Vilaine,
- BERTEAU Jean-Philippe, FFE, Conseiller Fédéral
- BERTHIER Sullivan, FFE, Secretaire de Section New York
- BLOCHE Patrick, Paris, Adjoint à la Maire de Paris, Député honoraire
- BOURGI Hussein, Hérault, Sénateur de l’Hérault, Conseiller Régional d’Occitanie, membre du BN et du CN
- BOUTIFLAT Dylan, Loiret, Membre du BN et du SN chargé des mobilisations internationales et des relations avec les ONG
- BRIBARD Stéphane, Paris, CA PS 10e
- CALLES-ICARD Esteban, Alpes-de-Haute-Provence, AF JS 04
- CHANTREL Yan, FFE, Sénateur
- CHEIKH Alia, Seine-Maritime, Conseillère municipale déléguée
- DALLET Antoine, Charente-Maritime, Conseil fédéral Charente-Maritime
- DUBOIS Francis, FFE,
- ENGELMANN Frédéric, Loire-Atlantique, Titulaire CNCF, SF44 Europe et international
- FROMENT Rubens, Rhône, Animateur Fédéral MJS 69
- GÉRARD Adrien, Meurthe-et-Moselle, Secrétaire général HES LGBTI+
- GONDARD Cécilia, FFE, SN EGALITE FEMMES HOMMES
- GONY Gilles, Paris,
- GRICOURT Marc, Loir-et-Cher, Secrétaire National
- GUCKERT Olivier, Meuse, Premier secrétaire fédéral, élu municipal et communautaire
- GUILLORY Franck, Paris, BF / Co-secrétaire de section Paris Centre
- H’LIMI Elias, Val-de-Marne,
- HASNAOUI Fwad, FFE, Cfde
- HELLEU Gilles, Haute-Garonne, Secrétaire de section de Saint-Jean
- HIRIGOYEN Hervé, Haute-Garonne, Conseil fédéral aux discriminations du 31, Titulaire du CF 31
- HUBERDEAU David, Rhône, Coordinateur HES Lyon
- HUMPHREY James, Haute-Garonne,
- KHARFALLAH Nadia, Haute-Garonne, Animatrice fédérale des Jeunes Socialistes de Haute-Garonne
- KIENZLEN Jonathan, Val-de-Marne, Président du groupe au Conseil régional IDF, SN, 1er SF94
- LAGARRIGUE Philippe, Aveyron, Secrétaire de Section
- LASNIER Philippe, Paris, Formateur national, CA, HES
- LEBON Luc, Paris, SF, CF, Maire Adjoint 11e arrondissement de Paris
- LEMAIRE Cédric, Oise, Maire-Adjoint, Trésorier Fédéral
- LEVESQUES Valerie, Seine-Maritime, CN SF
- LOISEL Maxime, Oise, SF à la mobilisation
- MACQUOY Christian, Seine-Maritime, Secrétaire de section
- MARTINET Stéphane, Paris, ex-président HES, ex adjoint de Paris 11è
- MICHEL Annie, FFE, Conseillère Consulaire
- MIDA Romain, Oise, Adjoint au Maire de Villers-Saint-Paul
- PALLEZ Laure, FFE,
- PAWELSKI Léa, Seine-Maritime, Conseillère départementale et adjointe au maire – secrétaire fédérale
- PIC Anna, Manche, Députée, 1ère Sec.Fédérale, SN BN
- QUINQUETON Denis, Paris, Ex président d’HES
- RAFOWICZ Emma, Paris, Présidente des Jeunes Socialistes
- RAUX Thomas, Rhône
- RICORDEL Sébastien, Seine-Maritime, Membre du CF
- RODRIGUES Maxime, Haute-Vienne
- ROLLAND Morgane, FFE, BF FFE
- ROQUES Sophie, Bouches-du-Rhône, Adjointe au Maire de Marseille, Secrétariat Fédéral
- ROUVIÈRE Guillaume, Paris,
- ROY Clarisse, Oise
- SMADJA-FROGUEL Catherine, FFE, SF à l’égalité
- THOMAS Vanessa, Loire-Atlantique, Suppléante CN
- TILLARD Hervé, Meurthe-et-Moselle, Maire de Chavigny et conseiller régional Grand Est
- VAUGLIN François, Paris, Maire du 11e arrondissement de Paris