La journée internationale de lutte contre les LGBTIphobies a été l’occasion de voir paraître plusieurs rapports sur les LGBTIphobies en France : celui de SOS Homophobie entre autre, qui recueille chaque année plusieurs milliers de témoignages, et celui du ministère de l’Intérieur, qui s’appuie sur les données de la police et de la gendarmerie. Tous deux confirment une tendance désormais bien installée : les violences et discriminations visant les personnes LGBTI+ ne faiblissent pas.
Une parole de haine de plus en plus décomplexée
Le rapport du ministère recense 4 800 infractions anti-LGBTI+ enregistrées en 2024, soit une augmentation de 5 % par rapport à 2023. Plus inquiétant encore, les crimes et délits progressent de 7 %, confirmant un recours croissant à la violence physique.
De son côté, SOS homophobie a collecté 2 377 témoignages, et souligne la persistance des insultes, du harcèlement, des agressions physiques, et des violences institutionnelles. Les personnes trans restent parmi les plus exposées.
L’année 2024 a été marquée par un contexte national et international tendu, avec la montée de discours réactionnaires à l’occasion des élections législatives, la politisation des enjeux trans et la multiplication des “paniques morales”. L’Éducation à la vie affective et sexuelle (EVARS) ou les parcours des mineur·es trans ont été instrumentalisés dans le débat public .
SOS homophobie souligne dans son rapport combien la parole haineuse s’est libérée, y compris chez des responsables politiques, dans une atmosphère médiatique polarisée. Ce relâchement a contribué à un sentiment de vulnérabilité renforcé chez les personnes LGBTI, en particulier les plus jeunes, les personnes trans, intersexes, racisées ou en situation de précarité.
Des conséquences profondes sur la santé mentale, les parcours de vie et l’accès aux droits
Au-delà des chiffres, c’est toute une série de conséquences concrètes que ces rapports documentent : isolement, mal-être, déscolarisation, perte d’emploi, précarité, ruptures familiales, etc. Le contexte “mal de vivre” est le plus représenté dans les témoignages, traduisant un épuisement psychologique qui va bien au-delà des seuls actes de violence .
Les personnes LGBTI sont aussi confrontées à des obstacles structurels : difficultés à porter plainte, manque de protection dans les milieux scolaires et professionnels, et peu de relais dans les institutions.
Une réponse publique encore insuffisante
Malgré l’existence de plans nationaux de lutte contre les LGBTIphobies, les moyens déployés restent très faibles et inadaptés à l’ampleur du phénomène. Les formations dans la fonction publique sont encore trop rares, les dispositifs d’accueil des victimes inégaux, et les campagnes de prévention souvent ponctuelles ou invisibles.
La réponse doit mobiliser l’ensemble des leviers de l’action publique : éducation, santé, culture, justice, emploi, logement. Les collectivités locales, les établissements scolaires, les services sociaux doivent être pleinement associés à cette politique, dans une logique de continuité et d’évaluation.
Il est urgent de mettre en œuvre une politique ambitieuse de lutte contre les LGBTIphobies, qui ne se limite pas à la seule répression pénale, mais intègre :
- Une action éducative renforcée dans les écoles, avec des moyens dédiés à l’EVARS.
- Un soutien structurel et pérenne aux associations de prévention et d’accompagnement.
- Une reconnaissance politique claire des discriminations vécues par les personnes trans, intersexes, bi·es, en sus des gays et lesbiennes
- Des politiques de santé mentale adaptées aux réalités LGBTI.
- Une transversalité dans l’action publique, intégrant les enjeux LGBTI dans le logement, l’emploi, la culture et la jeunesse.
HES appelle à replacer la lutte contre les LGBTIphobies dans une perspective plus large : celle de la justice sociale et de l’émancipation. Il ne s’agit pas d’additionner les dispositifs, mais de construire une société dans laquelle les droits ne soient pas négociables.
Le combat contre les discriminations est au cœur du projet de transformation sociale que nous portons. Il engage une vision de la République fondée sur l’égalité réelle, sur la capacité de chacun·e à vivre librement, sans peur ni assignation.