Dix ans après l’adoption et le mariage pour tous, alors que les combats LGBTI+ apparaissent davantage morcelés et éclatés, le contexte national et international vient nous rappeler l’impérieuse nécessité de continuer à marcher et célébrer nos fiertés au mois de juin, de partout en France et dans le monde.
La multiplication des actes de violence et une parole réactionnaire libérée en France
Depuis le début de l’année 2023, c’est à La Réunion, à Tours plusieurs fois, Perpignan, Nantes, que des centres LGBTI+ ont subi des actes de dégradations et de violences et à Albi, deux salarié.es d’une association de santé communautaire ont été agressé.es au mois de mai. Plusieurs symboles de notre communauté ont également été attaqués à Quimper (peinture sur un passage piéton aux couleurs de l’arc-en-ciel) et à Rennes (escalier arc-en-ciel dégradé sur un campus universitaire) entre autres. Ces faits témoignent d’une haine LGBTphobe qui se libère et elle trouve un écho dans le rapport annuel de SOS Homophobie qui pointe une augmentation des agressions physiques de +28 % entre 2021 et 2022, soit une tous les deux jours, et dans les instantanés de l’application FLAG ! étudiés par l’observatoire LGBTI+ de la Fondation Jean-Jaurès qui montrent que 70 % des signalements sont faits pour des infractions liées à la haine en ligne, en nette augmentation par rapport aux années précédentes.
Ces actes de haine touchent particulièrement les personnes transgenres. Depuis plusieurs mois, l’obsession médiatique (CNews, le Figaro, Valeurs actuelles, Marianne, etc.) et certains partis pris éditorialistes à charge et sans nuances laissent transparaître une rhétorique anti-trans assumée et contribuent hélas très largement à alimenter des paniques morales fabriquées de toute pièce, et à une libération d’une parole transphobe. Ces paniques morales trouvent parfois hélas un écho dans certains cercles se prétendant féministes et/ou de gauche… Il serait pourtant bon de se rappeler que les plus faibles sont bien souvent attaqués en premier, et qu’après les personnes trans ce sont les droits des femmes, des gays ou de toute autre minorité qui seront en danger. L’union est essentielle face au conservatisme, d’où qu’il vienne : quand des lectures de contes par des dragqueens, artistes symboliques de notre communauté et dont l’art permet entre autres de déconstruire les stéréotypes de genre, subissent des attaques paniques, en France comme aux États-Unis, c’est toute notre communauté qui est attaquée.
La faiblesse des politiques publiques à destination des personnes LGBTI+ menées par les différents gouvernements Macron depuis 2017 nous impose une vigilance militante accrue. Annoncé pour avant l’été par le Gouvernement en réponse à l’augmentation des violences anti-LGBTI+ et déjà contestable par sa méthode peu concertative, ce nouveau plan LGBTI peine à voir le jour et fait craindre un énième effet d’annonce, sans mesure concrète.
Des alertes inquiétantes au sein de l’Union européenne et dans le monde
Dans son rapport annuel de mai 2023, l’ILGA-Europe constate que les violences contre les personnes de la communauté LGBTI+ sont en forte hausse en Europe et explique que « 2022 a été l’année la plus violente pour les personnes LGBTI+ dans toute la région en plus d’une décennie […], à la suite de discours de haine de plus en plus répandus ».
Plusieurs faits doivent nous inquiéter : en Autriche, la police a déjoué une attaque terroriste contre la Marche des Fiertés de Vienne le 17 juin dernier et en Pologne et en Hongrie, du fait des régimes réactionnaires populistes et ultra religieux en place, les lois mettant en danger les libertés fondamentales des personnes homosexuelles et transgenres se sont multipliées ces dernières années, et l’Union européenne n’apporte pas aujourd’hui la protection suffisante aux citoyen.nes LGBTI+.
Rappelons également que dans soixante-neuf pays dans le monde l’homosexualité est illégale et que plusieurs États ont instauré ces derniers mois des lois criminalisant ou ciblant spécifiquement les personnes transgenres.
Nos luttes sont politiques
À HES et comme dans toutes les associations LGBTI, la visibilité de nos existences et de nos combats est un pilier de notre engagement que nous faisons vivre au quotidien au sein de nos espaces de militantisme, et ce, depuis quarante ans. Nos vies, nos familles, nos amours, nos couples, nos identités sont diverses et existent tout au long de l’année, dans tous les pans de la société, dans nos emplois, dans les lieux publics, dans les écoles, dans le sport…
Mais le mois des Marches des Fiertés revêt une importance particulière, car ces marches nous lient intimement à notre longue et souvent pénible histoire, elles sont un pont entre plusieurs générations de militant.es et des personnes LGBTI+ de par le monde. Les Marches annuelles, les « Pride », rassemblent très largement, celles et ceux qui se sont battu.es avant nous, les générations suivantes qui peut-être marchent pour la première fois cette année et celles et ceux qui n’ont toujours pas la possibilité et/ou la chance de pouvoir marcher, librement et sans crainte.
Ces marches sont l’occasion de mettre en avant nos revendications qui au fil des décennies ont évolué et qui diffèrent selon les pays où nous vivons. Elles sont l’expression de notre solidarité entre toutes les lettres de la communauté LGBTQI et ce n’est pas parce que certains droits ont été acquis que nous ne devons pas aujourd’hui marcher pour les plus jeunes et les plus fragiles d’entre nous, pour les jeunes trans, les jeunes homosexuel·le·s en rupture familiale, les jeunes victimes de harcèlement en raison de leur identité de genre et/ou orientation sexuelle.
C’est l’héritage de Stonewall, un héritage militant, positif, déterminé et éminemment politique, où notre communauté est soudée.
Alors RDV à Paris samedi à 14 h de Nation à République et dans toutes les villes où nous allons encore marcher en 2023 !