Robert Badinter nous a quittés ce jour. Infatigable combattant pour les libertés, fils de déporté, grand avocat, il a été un des responsables politiques qui aura permis aux 1eres revendications des collectifs de personnes homosexuelles de trouver un écho dans la loi en abrogeant le délit d’homosexualité dès 1982. Il a œuvré toute sa vie pour les droits humains, pour le bien commun, rendant notre société un peu meilleure.
Père de l’abolition de la peine de mort, Robert Badinter a été aussi un ardent défenseur de la cause des personnes homosexuelles. Comme souvent quand il s’agit d’engagement pour les droits, celui-ci trouve sa motivation dans sa propre vie : Robert Badinter évoquait il y a quelques mois au Monde sa fréquentation en tant que jeune avocat d’un milieu parisien avec des homosexuels proclamés mais aussi sa connaissance d’une affaire dans laquelle un notable de province, marié et père de famille, et poursuivi pour délit d’homosexualité, s’était suicidé.
Proche de François Mitterrand, cet intellectuel engagé a dès le milieu des années 1970 poussé les socialistes à réfléchir aux libertés et aux droits avec le “comité pour une charte des libertés” regroupant des intellectuels et des militants, qui voit pour la 1ere fois le PS s’emparer de réflexions autour du droit des malades, des étrangers et des détenus. Ce travail aboutit à la publication de “Libertés, libertés” en 1976, document fondateur qui ancre l’engagement politique de Robert Badinter dans celui des droits des personnes et des libertés publiques et avec lui, celui des socialistes. Ce comité est aussi précurseur de nos combats, ou d’une association comme la nôtre car il a permis aux socialistes de s’emparer de la question des droits et a contribué en son temps à ce que la gauche gagne la bataille des idées et des valeurs dans la société française, avant la victoire dans les urnes en 1981.
Robert Badinter trouve en Gaston Defferre, Maire de Marseille (ville où a été fondée le Comité d’urgence anti-répression homosexuelle – CUARH) et futur Ministre comme lui, un autre défenseur des personnes homosexuelles au Parti Socialiste. Le 11 juin 1981, Gaston Defferre, devenu ministre de l’Intérieur, supprime le groupe de contrôle des homosexuels à la préfecture de police et les fichiers les concernant et dès novembre 1981, la proposition de loi No 527 « tendant à abroger l’alinéa 2 de l’article 331 du Code pénal » ( qui datait de 1942 et du régime de Vichy) est déposée par le député Raymond Forni. La rapporteuse de la loi sera Gisèle Halimi, avocate féministe devenue députée de l’Isère. Il s’agissait de la principale demande des mouvements gays et lesbiens de l’époque, depuis l’après-guerre et les années 1950. La proposition de loi visait à l’égalité des âges de consentement pour les personnes homosexuelles et hétérosexuelles et la promulgation de la loi, le 4 aout 1982, mettait ainsi fin à cette discrimination et aussi aux persécutions qui ont pu en découler.
Pendant 9 ans il fut aussi président du Conseil Constitutionnel, puis sénateur PS durant près de 16 ans, missions où il resta un fervent défenseur des libertés, combattant contre le racisme et l’antisémitisme et aussi allié des LGBT.
Nous lui devons l’ abrogation du délit d’homosexualité en France, première étape du chemin d’une égalité pleine et entière et d’avoir été l’un des premiers responsables politiques à répondre et à accéder aux revendications des associations de gays et lesbiennes.
A l’heure où les idées réactionnaires et extrémistes infusent dans notre société, ses combats doivent rester un exemple pour la gauche.