Le cas de Lilie, petite fille transgenre est désormais connu grâce à la médiatisation de sa situation et des démarches de la famille pour leur enfant. 

Loin des stéréotypes et des clichés, la démarche parentale a permis à l’enfant de pouvoir éviter des souffrances inutiles. Notamment en l’accompagnant dans son choix de faire modifier son état civil, afin de faire concorder son prénom à son identité ressentie et à la perception de son entourage familial et scolaire, où Lilie est maintenant bien acceptée.

Une démarche juridique normale, encadrée par la loi… mais refusée par un procureur

Depuis la loi « Justice pour le 21siècle » — votée par la majorité de gauche en 2016 — le changement de la mention du genre à l’état civil est possible « sans aucune démarche médicale » entamée, et le changement de prénom est, lui, du ressort de l’officier d’état civil.

Il a donc fallu qu’un fonctionnaire officier d’état civil choisisse de refuser le changement de prénom de l’enfant et demande l’avis du procureur, pour que celui-​ci décide de ne pas respecter la loi, sans empathie ou humanité aucunes.

Car rien, dans les textes de loi, n’impose à quiconque (et surtout pas à une enfant qu’on accuse déjà trop facilement de « passer par une phase » !) de subir des changements irréversibles de sa physiologie pour avoir droit à une simple modification de son prénom. Il est tragique que le parquet ne maitrise pas ces éléments et que la chancellerie n’ait pas rappelé sur le champ la loi. 

Outre cette demande illégale, on peut largement questionner la démarche d’un procureur demandant à ce que le corps d’une enfant soit modifié afin de pouvoir changer de prénom ! Cette estimation tragique est une faute lourde éthique.

L’application de la loi de 2016 toujours problématique et les avancées toujours attendues

La loi de 2016 reste encore inégalement et inéquitablement appliquée dans notre pays, et cette dernière affaire le démontre encore, si cruellement. Qu’attendre donc, pour les personnes trans, de cette majorité pro Macron pour réaliser les avancées attendues pour notre loi ? Avancées que certains de nos voisins européens ont déjà mis en place, avec la déjudiciarisation totale, notamment, des procédures de modification de l’état civil.

Il n’est pas acceptable que le ministère de la Justice ne sache pas appliquer nos lois et oblige à des citoyens de rentrer dans de longues et coûteuses procédures pour le simple respect de leurs droits, l’application des lois en vigueur et pour le respect au quotidien d’une enfant très claire, sûre et décidée. Il faut de toute urgence que le ministère de la Justice rappelle publiquement les textes et fasse revenir à la raison ce procureur.

La transidentité des mineurs, un point aveugle de la société

Les personnes transgenres restent largement ignorées des politiques publiques et la transphobie qu’elles subissent en font les personnes les plus représentées dans les idées suicidaires et les passages à l’acte. À l’heure où plusieurs études indiquent que quelques 10 % des mineurs et adolescents sont victimes de cyberharcèlement, cela inquiète d’autant plus pour les jeunes LGBT, notamment trans : ni l’Éducation nationale ni la police ne sont assez formées et dotées de moyens pour détecter, protéger et agir rapidement en évitant des drames. 

Déjà en décembre 2020, une lycéenne trans de 17 ans s’est donné la mort, face aux brimades et au mépris, et elle fut gravement mégenrée post-​mortem par la rectrice, représentante directe du ministre de l’Éducation nationale, qui osa en parler au masculin (en s’excusant trop tardivement ensuite)… 

Les violences institutionnelles et personnelles dont elles sont victimes n’épargnent pas les mineur·e·s, de tous âges, qui sont encore confronté·e·s à une société qui refuse de reconnaître leur existence et trop souvent aussi des familles qui, par ignorance, peur ou rejet, choisissent — au mieux — d’ignorer leurs situations. 

Il est temps que la France s’inspire des législations vertueuses en la matière (comme en Argentine) et de prendre en compte les recommandations d’associations et d’organisations internationales.