La biologie joue un rôle évident en santé et le social est loin d’être neutre. Le sexe et, par corolaire, l’orientation sexuelle, et l’identité de genre ont des effets profonds à la fois sur l’approche en santé selon les personnes, mais aussi – et surtout – sur la capacité de notre système de santé à appréhender correctement les questions de santé pour les personnes LGBTI+.

Entre les normes administratives, les règles sociales, plus ou moins conscientes au sein desquelles nous évoluons et nous nous débattons, les procédures médicales, les essais cliniques qui ont lieu sur la pharmacopée, etc., de nombreux paramètres participants de notre système de santé font la preuve de l’oubli, de l’évitement, du manque de données ou de considération de la population LGBTI+.

L’une des réponses à ces oublis et déconsidérations, c’est la santé « communautaire », on parlera aussi de santé populationnelle. Il s’agit d’adapter des politiques de santé (de les adapter ou de les créer, de les modifier, et d’en supprimer aussi) pour qu’elle corresponde à la réalité des modes de vie, des actions, des effets socioéconomiques qui sont celles d’une partie de la population de notre pays, ici, les personnes LGBTI+.

Entendons-​nous bien, il ne s’agit pas de dire que la totalité des questions médicales, de prévention, de la santé, au sens large, exige des approches précisément particulières pour les LGBTI+, mais bien de dire qu’on ne saura considérer que, compte tenu de la manière dont elles sont produites, les réponses aux questions de santé s’appliquent uniformément à chacune et chacun.

Ce sera l’exigence de pouvoirs publics soucieux de la santé des personnes LGBTI+ (et des autres !) que de travailler, avec les professionnel·les de santé, avec les chercheur·se·s, avec les professions médicales, au sens large, et paramédicales, avec les industriels et les entreprises qui travaillent dans le domaine de la santé et de la prévention afin que le genre et l’orientation sexuelle deviennent des paramètres évidents et incontournables dans la recherche, les méthodes, les approches et les réflexions en santé.

Surtout, cette section de notre Manifest’HES sera peut-​être la façon la plus efficace de démontrer que le « communautarisme », loin d’être une antithèse à l’universalisme, ou un monstre antirépublicain protéiforme, est bien, en réalité, un des moteurs d’une citoyenneté active. Celle des minorités et des « mis de côté » qui veulent rejoindre le commun et le collectif le plus vaste, sans autre demande que le respect et la dignité que l’on doit accorder à chacun.

Il faudra pour cela se souvenir que, à chaque fois que des combats pour la santé et la prévention ont été menés par des associations volontiers qualifiées de « communautaristes » par les réactionnaires, leurs débouchés ont profité à toute la société. Les victoires acquises n’ont en rien été un prix gardé jalousement par certain·es, mais véritablement un bien commun profitant à tout le monde. Il a régulièrement été arraché à « l’ordre des choses » et contre des « évidences » heureusement remises en question.

Les biais de perception chez les individus, et notamment chez les professionnels de santé, amènent à des comportements sanitaires qui sont problématiques. Que ce soit l’évitement de médecins lorsqu’on les sait, ou les craint, peu à l’écoute ou pire, diagnostic bâclé ou basé sur des refus d’écouter les patient·es parce que les stéréotypes ou les biais sont trop prégnants selon le genre, l’orientation sexuelle, l’origine des patient·e·s…

Toutes ces questions irriguent la façon dont les professionnels de santé, dans notre système de santé, reçoivent, entendent, traitent et suivent des patients. Les personnes LGBTI+ ont, depuis des années, dû faire face aux stéréotypes qui non seulement faussent le diagnostic, mais surtout empêchent une consultation efficace, tant du point de vue du patient, que de celui du praticien.

Alors que les essais cliniques, comme les formations sur les LGBTI+, sont loin d’être des parts entières du cursus de formation ou des recherches médicales, en France, ce sont autant de perspectives professionnelles et de démarches médicales qui manquent dans le rapport à la santé des LGBTI+. Une carence qui frappe encore plus les lesbiennes et l’invisibilisation de leur sexualité, notamment.

La volonté d’être traitée comme tout le monde, c’est-à-dire sans discrimination, n’est pas une lubie. La réalité d’un manque d’accès aux informations importantes lorsque l’on est LGBTI+, notamment, de la part de l’institution médicale reste importante, comme le démontre l’enquête menée par Thibaut Jedrzejewski. De la même manière que pour des personnes racisées qui ont pu établir des listes de médecins de référence, il faut se rappeler que c’était une pratique courante dans les années 80 et 90 (et qui continuent) où les PVVIH et les homosexuels notamment s’échangeaient des listes de médecins surs. Des professionnels qui accueillaient un·e patient·e et la traitaient avec la rigueur et le professionnalisme attendu dans la dignité et l’absence de réflexion malvenue (entre autres).

Sans même ces comportements regrettables, il y a aussi une dimension sanitaire forte à avoir des praticiens et professionnels de santé conscients que leur regard est celui d’êtres humains, faillibles, biaisés comme le sont leurs patient·es. La santé sexuelle et la santé tout court sont mieux traitées lorsque la connaissance d’un patient par son médecin est plus forte, et celle-​ci n’est entièrement possible que lorsque la confiance existe dans l’écoute, et le respect…

Les professionnels de santé ne sont pas exempts de propos et actes discriminatoires (pas plus ni moins qu’aucun autre secteur), mais les défaillances ordinales restent des motifs « d’autoorganisation » des patient·es. L’Ordre des médecins s’est d’ailleurs fait épingler par la Cour des comptes pour son suivi lacunaire des plaintes (Le Quotidien du Médecin hebdo, 7 mai 2021). Enfin, sur ce sujet comme d’autres, il faut continuer à préférer la réflexion et l’intelligence aux mouvements réflexes malvenus et galvaudant des termes et concepts (mal définis, qui plus est) qui n’ont pas grand-​chose à voir avec le sujet. La santé populationnelle (communautaire) et l’organisation qu’elle peut créer visent à la bonne santé et à l’accès aux soins. La protection et la recherche de la meilleure aide en santé ne sont en rien confondables avec des réflexes identitaires de rejet et des discours de haine.

HES propose :

  • Organiser la formation des professionnels de santé en intégrant des modules et cours sur la santé LGBTI+ afin de réduire, qui doivent supprimer les lacunes et les biais de traitement.
  • Développer les recherches et essais médicaux sur les populations LGBTI+, pour des remontées statistiques et des informations sur les sociologies et psychologies également.
  • Introduire, améliorer les questions de transition et de transidentité, ainsi que celles sur l’intersexuation, car elles ont une place évidente au sein des cursus de formations des professionnels du secteur éducatif, médical et social.
  • Refondre, avec les praticiens et dans leurs différents champs, une organisation ordinale moins déconnectée des réalités des professions de santé et plus efficace dans le suivi des dossiers qui lui sont confiés.
  • Organiser une mission parlementaire dotée des moyens et du temps suffisant pour réviser, dans le Code de la santé, la place accordée à la justice ordinale. Et pour réévaluer la pertinence du maintien des institutions ordinales, notamment la détention par celles-​ci du pouvoir de sanction pour manquements déontologiques, à fortiori de radiation de l’Ordre.

Focus

Thibaut Jedrzejewski, médecin parisien, est l’auteur d’une thèse en 2016 : EGaLe-​MG, enquête gay, lesbienne médecine générale.

Sur les plus de 3 200 réponses, seulement 7,3 % des femmes et 23,6 % des hommes déclarent avoir reçu de la part d’un médecin généraliste des informations jugées adaptées, utiles ou intéressantes sur la prévention des infections sexuellement transmissibles (IST)
ou la sexualité.

Quatre décennies après ses débuts, l’épidémie de VIH-​Sida n’est pas vaincue, mais les progrès ont été considérables pour les PVVIH, et pour se doter d’outils prévenant les nouvelles contaminations. Mais, en France, les contaminations progressent à nouveau dans la population gay.

La prévention, assez largement répandue, ne va pourtant pas de soi et les prises de risques ont tendance à s’accentuer, notamment parmi une population jeune, qui n’a pas d’éléments d’histoire de cette épidémie. En outre, la situation médicale ayant, heureusement, évolué, le Sida tend à se muer en une affection chronique dans la majeure partie des cas.

Ça n’en reste pas moins une maladie grave. Et la lutte contre une pandémie comme celle du VIH doit tous nous engager, que nous soyons séropositifs ou séronégatifs : chacun a la responsabilité de ne pas transmettre et/​ou de ne pas s’exposer. Ce qui implique de faire passer un certain nombre de messages à propos de la prévention – notamment qu’en cas de couple sérodifférent, la prévention n’est pas l’affaire de la seule PVVIH, mais bien des deux personnes – et de ne pas entrer dans une logique de pénalisation de la transmission du VIH ni, d’ailleurs, de hiérarchisation des IST.

HES propose : 

  • De renforcer les actions de prévention ciblées. Ainsi l’offre de dépistage et de conseil en direction de la population LGBTI+ doit être soutenue, qu’elle soit proposée dans les centres de dépistage anonyme et gratuit (Cegidd), dans des centres de santé sexuelle, ou encore dans un cadre associatif. Cette offre ne doit pas se limiter au dépistage du VIH, mais inclure aussi les autres IST (qui favorisent la transmission du VIH), la prévention, la santé sexuelle et les traitements.
  • De continuer à faciliter l’accès aux autotests en en diminuant le coût, voire en les intégrant dans un parcours de suivi personnalisé à distance, à l’image de l’expérience MémoDépistages qui levait des freins structurels. Ceci afin de contrer les carences dans le volume de dépistages que la crise sanitaire a engendré… Et pour améliorer toujours davantage le suivi de populations éloignées des Cegidd et des lieux associatifs, et éloignées de la question des dépistages. 
  • D’encourager les temps d’échange, à l’occasion du dépistage, entre les personnes qui viennent se faire dépister et des acteurs associatifs afin de développer une réflexion non stigmatisante sur les pratiques à risques et les méthodes de réduction des risques. Il s’agit de tirer profit des expériences menées par des structures comme le « 190 » à Paris, un centre de santé sexuelle, pour aboutir à une approche globale et pluridisciplinaire de la santé sexuelle et qui concerne les personnes séronégatives comme les PVVIH.
  • De renouveler les campagnes de prévention vers les publics ciblés en y intégrant le fait que l’âge du premier rapport sexuel tend à diminuer et qu’il faut élaborer des messages s’adressant à une population d’adolescent·es plus jeunes.

Un hôpital public formé à l’accueil de tou·te·s les patient·e·s et pour des parcours de soin éthiques

L’hôpital public est un maillon vital de la chaine de santé dans notre pays. La crise sanitaire aura fait la démonstration, à qui en doutait, de l’importance d’un hôpital public correctement financé, à la gouvernance étayée, et doté des moyens concrets pour que ses professionnels soient respectés et considérés (à tous les niveaux).

HES propose : 

  • L’obligation du renforcement pérenne du service public hospitalier – qui ne peut pas être géré comme une entreprise privée et encore moins vouloir faire des « bénéfices » – avec plus de moyens humains, techniques (processus et traitements innovants, analyses sur place si possible, Recherche médicale, davantage d’IRM), éducatifs (CHU formant les futurs professionnels de santé), numériques et financiers, avec un constant souci éthique (secret médical, protection des données personnelles) et de sécurité sanitaire, la crise du Covid ayant révélé aux yeux de toutes et tous un système à bout et exsangue qui maltraitent les patient·es, les suit et les soignent mal. Et l’hôpital public est la clé de voute à remuscler pour bien des LGBTI, comme pour l’aide à la reproduction (PMA) ou encore pour les parcours de transition.
  • Intégrer au sein des cursus de formation initiale obligatoire des professionnels de santé exerçant en hôpital, des modules sur les sujets LGBTI, aussi bien au point de vue médical, que pour les approches sociales et le traitement des dossiers des patient·es (et de leur famille).
  • Intégrer, lorsque des acteurs pertinents sont présents localement, des représentants des associations LGBTI+ au sein des conseils de surveillances des hôpitaux. Cela peut se faire autant par la nomination de personnes qualifiées, qu’au sein des représentants des usagers.

L’accès à des praticien·ne·s formé·e·s et respectueux, qui ne considère pas la transidentité comme une pathologie, aussi bien dans l’hôpital public qu’en médecine libérale semble une évidence, qu’il faut pourtant rappeler. Des praticien·ne·s formé·e·s sur les questions trans sont nécessaires aussi pour que les accès aux soins des personnes trans soient identiques à tou·tes les autres patient·es, avec une connaissance des enjeux de santé des personnes trans suivant un parcours de transition ou non.

Cela doit permettre une confiance des patient·es dans le ou la professionnel·le de santé en face, pour évoquer tous les sujets pertinents à la prise en charge médicale, sans craindre de discrimination, ou de subir une maltraitance médicale que des stéréotypes engendrent.

Plus globalement, l’accompagnement des personnes trans dans leur parcours de soins, au-​delà de ce qui touche à la transition, demande aussi la possibilité d’avoir accès à des professionnel·les formé·es. D’abord pour éviter les discriminations envers leurs patient·es, et pour éviter les biais de diagnostic.

Il faut aussi des études et recherches médicales sur les pathologies qui intègrent des personnes trans, ainsi que des données sur les interactions médicamenteuses qui soient disponibles, afin de proposer des traitements efficaces pour traiter les pathologies pour lesquelles on consulte, et qui ne soient pas dangereux pour les personnes trans. Cela fait encore cruellement défaut aujourd’hui.

Au sein des protocoles de recherche et des démarches scientifiques, il faut aussi intégrer la transidentité pour évaluer les différences pharmacodynamiques et pharmacocinétiques sur les différents traitements, en lien avec les éventuels parcours de transition débutés (et les traitements liés) dont les personnes peuvent avoir besoin au cours de leur vie. (Voir Droits des personnes)

HES propose :

  • La prise en charge équivalente, partout en France, pour toutes les personnes trans, de leur parcours de transition, quel que soit celui choisi.
  • La mise en place d’un dispositif exonérant autre que l’affection longue durée (ALD) 31, pathologisante et source de discriminations pour encadrer la prise en charge des soins potentiellement sollicités par les personnes trans et/​ou intersexes au cours de leurs parcours, et mettre fin à l’arbitraire des médecins-​conseils et aux inégalités de traitement d’une caisse d’Assurance maladie à l’autre. 
  • Un réel échange de fond entre la Haute autorité de santé (HAS), le ministère de la Santé, les associations afin que les personnes trans, qui sont les premières concernées, soient enfin actrices dans la révision du rapport sur la prise en charge des transidentités en France. 
  • L’application concrète de la nouvelle classification des maladies de l’OMS (CIM-​11, applicable depuis le 1er janvier 2022) pour une réelle dépsychiatrisation des parcours de transition. 
  • Appliquer la décision-​cadre du Défenseur des droits (DDD) de 2020 : Les organismes de Sécurité sociale conditionnent la prise en charge financière des soins liés à transidentité au respect des exigences contenues dans le protocole de la HAS mis en œuvre par la FPATH « qui ne repose sur aucune base légale ». Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales de 2011 indiquait que les protocoles de soins de la FPATH n’avaient aucune base légale, juridique ou médicale, ces protocoles sont « unanimement considérés comme obsolètes ».
  • Intégrer les personnes trans et la transidentité dans les essais cliniques et protocoles de recherche pour des traitements efficaces et des données médicales sur les personnes trans pour notamment une meilleure compréhension des interactions médicamenteuses et une prise en charge plus efficace en tant que patient·e·s.

Focus : Trans-Santé

Aussi appelée « French Professional Association for Transgender Health (FPATH)», est une société « savante » renommée en 2020 et qui avait été créée en 2010, sous le nom de Société française d’études et de prise en charge du transsexualisme (SoFECT). Réunissant des professionnels impliqués dans la prise en charge des personnes transgenres, elle travaille sur les parcours de transition, la recherche et la formation.

Son poids important dans les processus hospitaliers permettant aux personnes trans d’être prises en charge lors de leurs transitions, a régulièrement été dénoncé par les associations, d’une part parce que l’association n’est en rien une structure que la loi impose de consulter pour les parcours de transition, ou qui serait une instance reconnue dans des textes.

Toutefois, des circulaires du ministère de la Santé ont obligé les personnes à passer par des équipes « officielles » pour obtenir la prise en charge de leur parcours de transition.

Et d’autre part parce que les personnes qui ont eu à devoir passer par ses membres, ont connu différentes problématiques dans la manière dont elles ont été traitées : pathologisation de la transidentité, regard – et discours – discriminant sur la transidentité et les personnes trans, obligation de suivi psychiatrique avant l’entrée en parcours de transition et « filtrage » des patient·es acceptés par des décisions collégiales de médecins…

Sans compter les demandes de la plus farfelue à la moins respectueuse sur la vie quotidienne et la considération du sérieux ou de la valeur de la demande des personnes trans. Nombre d’associations demandent son démantèlement.

La première action à mener pour une révision profonde des visions et la levée de l’ignorance et des stéréotypes sur l’intersexuation reste encore la formation initiale – et au-​delà – des équipes médicales. C’est d’une importance capitale d’abord pour la santé des personnes intersexes, afin que celles-​ci soient correctement traitées par les praticien·ne·s et que les familles des enfants intersexes aient les réponses correctes, débarrassées des tabous, mais aussi pour leur famille, afin que notamment les enfants en bas âge n’aient pas à subir des violences médicales et des mutilations. Il faut aussi organiser l’intégration de l’intersexuation et des personnes intersexes comme sujet d’étude, au sein des protocoles de recherche, dans les essais cliniques permettent aux intersexes d’être correctement aiguillées vers les protocoles et les pharmacodynamiques et pharmacocinétiques. Ce sont elles qui seront amenées à rencontrer les intersexes, notamment les enfants en très bas âge, et leurs familles, et à informer et proposer des actions. Enfin, si l’accès à un service de santé, au sein, notamment, de l’hôpital public, qui soit respectueux des personnes est si important c’est parce qu’il reste toujours nécessaire de révéler les normes sociales qui pèsent encore sur les personnes et engendrent des problèmes éthiques, dans l’institution médicale. (Voir Droits des personnes)

HES propose : 

  • La formation de l’ensemble des personnels, médicaux, paramédicaux, de tous les personnels de santé, sociaux et de la petite enfance dans leurs études au sujet de l’intersexualité. La présentation des variations intersexes dans les supports de cours adaptés, sans pathologisation ni stigmatisation, pour des équipes informées et pédagogues.
  • L’intégration de l’intersexuation au sein des protocoles de recherche et de formation des équipes médicales pour développer les connaissances des praticien·nes. 
  • Intégrer les personnes trans et la transidentité dans les essais cliniques et protocoles de recherche pour des traitements efficaces et des données sur les personnes trans pour une meilleure compréhension des interactions médicamenteuses et une prise en charge plus efficace en tant que patient·es.

La lutte contre le VIH-​Sida et autres IST suppose que le maintien du niveau de sécurité du système de don du sang en France n’implique pas une sélection stigmatisante. En 1983, avec une prévalence alors importante du VIH-​Sida chez les gays et la très forte menace de transmission du virus via le sang, de nombreux pays d’Europe avaient interdit, à vie, le don de sang aux homosexuels masculins. Le statuquo de cet interdit total dura très longtemps.

La gauche au pouvoir, durant le mandat de F. Hollande entre 2012 et 2017, a justement mis fin à cette pratique plus que trentenaire, devenue caduque au regard des progrès médicaux et de dépistage précoce des poches de sang. La majorité de l’époque avait aussi, en même temps, totalement rouvert le don de plasma pour les gays, en organisant sur les mêmes bases, les possibilités de don, que les donneurs hétérosexuels.

Mais, sur exigence très précautionneuse des médecins et experts de l’EFS notamment, demeurait une période d’« abstinence sexuelle » pour les gays/​HSH avant tout prélèvement, avec une réduction de cette période prévue selon les résultats obtenus par des études dans les années à suivre. Ces délais avaient déjà été réduits, logiquement. Toujours en constatant que la sécurité transfusionnelle restait maximale.

En rejetant le mot de « discrimination » sur ce sujet – car le don du sang n’est un droit pour personne, le mot est impropre lorsque l’on parle d’un acte d’abord altruiste qui vise à aider son prochain et qui répond à des critères de santé précis –, il est désormais entériné la fin des considérations de pseudos « groupes à risques », dans les questionnaires et les évaluations médicales pour évoquer les pratiques ou comportements à risques.

À ce titre, la responsabilité individuelle ne peut rien seule, sans aide pour une action communautaire en santé et les moyens qui lui sont nécessaires. Dès 2018, le groupe Socialistes et apparentés avait déjà proposé à l’Assemblée nationale un amendement supprimant les délais restants (4 mois). Refus total de la majorité et de l’exécutif Macron…

En 2020 et 2021, à l’occasion de la laborieuse étude de la loi bioéthique – le député Hervé Saulignac, a proposé à nouveau un amendement supprimant ces délais résiduels de 4 mois. Ce fut enfin accepté et voté ! Cet aspect de la loi bioéthique, adoptée et promulguée à la fin de l’été 2021, devait selon même l’engagement formel du ministre Véran, d’appliquer dès le 1er janvier 2022.

Évidemment, force est de constater qu’il n’en fut rien, faute de volonté politique et de publication des décrets d’application. La levée de cette interdiction interviendra finalement le 16 mars 2022.

HES propose :

  • Maintenir à son maximum la sécurité transfusionnelle comme élément primordial de la politique de dons des fluides (sang, plasma) et de dérivés sanguins pour les malades, et garder toute latitude aux pouvoirs publics pour réviser les conditions de don, en lien avec les agences de santé.
  • Garder en tête que la voie règlementaire reste une possibilité pertinente de l’action politique en matière de santé publique. Celle-​ci ne doit pas non plus être utilisée à tort et à travers ou pour se soustraire à des débats parlementaires. 
  • Continuer de travailler avec les associations de malades, les associations LGBTI+ et les groupes d’épidémiologistes pour garantir les « approches » non discriminantes dans l’accueil des volontaires au don de sang, mais continue de garantir la sécurité que l’on doit d’abord et avant tout aux malades.
  • Expliciter les raisons du maintien ou de la création de critères d’exclusion, et réaffirmer le traitement similaire entre les personnes volontaires pour le don selon leurs traitements médicaux, leurs pratiques et leurs comportements et non leur orientation sexuelle ou identité de genre. Exemple : l’exclusion du don du sang des personnes prenant la PrEP, ou d’autres médicaments lourds compréhensibles à différents niveaux, doit être explicitée, afin de ne pas laisser les associations de lutte contre le VIH-​Sida être seule à « déchiffrer » les politiques publiques en santé.
  • Informer clairement (et rassurer) avec sérieux le grand public et en même temps d’inciter fortement, désormais, les gays à donner leur sang, afin que cet ajustement légal nécessaire ne reste pas purement théorique, mais soit bien opérationnel partout en France.

Alors que la crise liée à la Covid-​19 n’est pas finie, il faut intégrer le fait que toutes les dimensions ratées dans la lutte contre cette épidémie ont des points de comparaison pertinents avec ceux réussis, dans la lutte contre le VIH-​Sida. Le choix de l’exécutif actuel, de ne pas faire une prévention grand public qui ne stigmatise pas les malades, ou encore l’absence de la diffusion d’une information, sure et fiable, au moment où elle est disponible.

e choix aussi de la dicibilité de l’ignorance des pouvoirs publics et des autorités scientifiques lorsqu’aucun élément pertinent n’est disponible sont des éléments de poids dans le discours public de responsables sanitaires ou politiques afin de diffuser les notions, les modes de prévention, les données sur un virus et une maladie souvent mal connus.

Ifaut encore y ajouter le refus du stigmate et des anathèmes notamment sur les personnes porteuses du VIH, la sérophobie, et celles qui posent, sincèrement des questions sur les modes de transmissions et les moyens de se protéger. Cela va de pair aussi avec le refus absolu de l’individualisation de la responsabilité dans les contaminations, lorsque les choix politiques qui sont faits laissent courir les risques ou les accroissent. À cet endroit, les différents choix de l’action et des financements publics opérés par les pouvoirs publics sont des clés déterminantes dans la lutte contre une épidémie, pour une bonne ou une mauvaise gestion.

Danse contexte, exposé aux yeux de tou·te·s en 2020 notamment, de problèmes d’approvisionnement voire pénurie de produits de base, notamment d’équipements médicaux (masques chirurgicaux, gants, seringues, respirateurs) et de médicaments courants, la France et l’Europe tout entière ont enfin réalisé la trop grande dépendance avec des fournisseurs très lointains, notamment la Chine et l’Inde.

Notre pays et le continent tout entier doivent rapatrier rapidement des « stocks de sécurité », imposer cela aux grossistes du secteur de la santé et de la pharmacie, et surtout réimplanter aussi des productions locales, pour éviter toute pénurie, mais aussi tout chantage « diplomatique » ou spéculation sur ces produits vitaux pour la santé publique.

Sur d’autres IST, la recherche médicale, l’accès à la prévention, aux soins et aux médicaments doivent être poursuivis et garantis au plus grand nombre, sur tout le territoire. Sur les sites web publics, notamment des ministères, les informations doivent être claires, bien mises à jour et compréhensibles par toutes et tous…

Des médicaments novateurs et efficaces, contre l’hépatite C par exemple, doivent être pleinement abordables dès l’autorisation de mise sur le marché (AMM), et non pas couter plusieurs milliers d’euros par an et par patient·e, surtout quand de l’argent public a contribué à découvrir un remède…

Par ailleurs, les milliards rapidement débloqués et investis dans le monde entier en 2020 contre la Covid-​19 ont permis de faire enfin aboutir plus de 40 ans de recherche sur l’ARN-messager, et par ricochet de faire avancer aussi la longue quête d’un vaccin contre le VIH-​Sida avec cette technique.

Fin 2021, des premiers résultats inédits et encourageants, validés au plus haut niveau aux États-​Unis notamment, ont été publiés en ce sens, une piste à suivre de près donc. (Voir Éducation et Enseignement – Recherche) Rappeler aussi en permanence que les préservatifs (bien utilisés) sont toujours un outil formidable (facilement accessible et peu cher) de protection contre les IST (dont le VIH-​Sida) et évidemment contre toute grossesse non désirée.

Focus : VIH, état des lieux

La France compte en 2021 quelque 175 000 patient·e·s séropositif·ve·s suivi·e·s, connu·e·s du système de santé et pris·es en charge par la Sécu. Mais experts comme associations estiment en sus qu’environ 25 000 personnes ignorent leur séropositivité dans le pays, selon Santé publique France en 2020 on notait encore que « 30 % des infections au VIH ont été découvertes à un stade avancé » : non seulement ces personnes ne sont pas traitées pour contrôler le virus de manière efficace et rapide, mais elles peuvent également disséminer le VIH-​Sida sans le savoir…

D’où l’importance d’inciter toujours fortement au dé- pistage, qui doit être facile d’accès et gratuit.

HES propose : 

  • En politique de santé, le soutien aux associations de lutte contre le VIH-​Sida qui agissent localement chaque jour contre la précarité des personnes malades, pour la solidarité envers les séropositifs et pour la prévention est une première étape facile et rapide à mettre en place. Il peut passer par un accord national avec les structures publiques de santé et prévention et les délégations ministérielles adéquates. Cela devra assurer des subventions pour fonctionnement et projet, classiques, la facilitation aux prêts de locaux dans les localités où c’est nécessaire pour les associations, et de pouvoir engager tout autre moyen discuté entre les associations et l’État et ses services en lien avec les collectivités. 
  • Tout nouveau traitement – innovation médicamenteuse ou avancée thérapeutique du mode d’administration – validé par les autorités sanitaires à divers niveaux (l’Agence européenne des médicaments/​EMA pour l’UE, la HAS) jusqu’à l’AMM et la mise en circulation effective sur le terrain doit continuer à être toujours pris en charge entièrement par la Sécurité sociale. Il doit être accessible rapidement, sur tout le territoire et facilement pour les PVVIH éligibles, et pas forcément limités aux seuls hôpitaux. Le traitement de bithérapie – combinaison de deux antirétroviraux – par injection intramusculaire tous les deux mois, à la place de la prise quotidienne de comprimés, disponible au tout début 2022 en Europe, est hélas circonscrit à l’hôpital pour les 3 premières séances). Le confort direct induit peut être conséquent selon les modes de vie et l’âge, notamment pour améliorer la bonne observance du traitement – cruciale – la perte ou la dissimulation de prise de médicaments (face à la famille, aux collègues, pendant des voyages). Dans la même optique, la PrEP par injection bimensuelle, déjà validée aux États-​Unis, vient d’être autorisée et sera proposée prochainement en France.
  • Organisation de partenariats et conventions pluriannuelles pour les associations, notamment celles ayant des activités économiques dans le domaine de la santé, et mutuelles afin de sécuriser leurs activités et permettre un travail serein à leurs équipes qui proposeront une offre de soins pérenne dans des territoires où l’action de la puissance publique fait défaut.
  • Maintenir la disponibilité aisée (distributeurs, ventes en grande surface et pharmacies) et des campagnes régulières de promotion des préservatifs, masculins et féminins, partout en France. Envisager la baisse de la TVA sur ces produits (déjà baissée par la gauche à 5,5 % depuis début 2014), à aligner dès que possible sur celle des médicaments (2,1 %). Les gels et lubrifiants sexuels sont, hélas, toujours taxés avec une TVA à 20 %, qui devrait aussi être baissée, car c’est un outil de santé et de bienêtre évident.
  • Enfin, la présence des responsables politiques de premier plan (parlementaires, ministre, Premier ministre et président de la République) à l’occasion des manifestations du 1er décembre (journée mondiale de lutte contre le VIH-​Sida) accompagnera ces efforts et montrera leur degré d’implication dans ce domaine.

Aller plus loin : Santé publique France

En France, en plus de 20 mois de « cohabitation » avec l’épidémie de Covid-​19, les consultations et prescriptions de PrEP ont hélas beaucoup baissé, le nombre de dépistages a fortement diminué, laissant craindre que cette épidémie n’en ait caché une autre, souterraine et dangereuse.

Les « sexualités cachées » dans cette période d’interdits, de confinements et de couvre-​feux représentent des sources possibles de pratiques à risques, de contaminations avec plusieurs IST qu’il eût fallu et qu’il faudrait encore intégrer dans une stratégie de santé publique cohérente et plus poussée.

Alors que la PrEP a fait la preuve de son efficacité dans la lutte contre le VIH-​Sida (une récente étude au long cours l’a encore attesté ces jours-​ci), la baisse des consultations depuis le début de l’épidémie qui se retrouve dans une baisse de 35 % des diagnostics pour 2020, est une mauvaise chose. Souvent due à la baisse de fréquentation des centres de dépistages (Cegidd), cette donnée a mis trop de temps à attirer la légitime attention du gouvernement, pour une autorisation de la délivrance et du suivi PreP en médecine de ville, qui n’a fini par arriver qu’en septembre 2021.

HES propose :

  • Établir un plan de santé publique pour des campagnes d’incitation au dépistage et à la consultation de professionnels de santé, en lien avec les associations et l’accueil et la gestion efficace des demandes de rendez-​vous pour les traiter rapidement et efficacement. Évidemment une vraie lutte déterminée contre les déserts médicaux est un passage obligé pour parvenir à cela. 
  • Organiser et diffuser correctement, avec des durées et temporalités pertinentes, des campagnes d’information, dans une approche populationnelle (communautaire), afin d’informer tous les publics et proposer une action adéquate pour la prévention avec des programmes ciblés (et financés) : pour les réfugié·es, les HSH, les LBT, les personnes détenues, les TDS, les usagers et usagères de drogues…

Le travail de déconstruction des préjugés et des fausses informations (les « fake news »… qui ne sont pas seulement sur internet et les réseaux sociaux) reste entier. Les idées fausses encore trop répandues, et pour certaines regagnant du terrain à l’aune de la diffusion de fausses informations, de délires complotistes et de peurs infondées.

Elles sont les meilleures alliées du VIH-​Sida et contribuent à l’ignorance sur le sujet. Une ignorance qui conduit à la peur, voire à la haine, envers les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) contribuant à générer une image fausse et éculée de l’épidémie et de la santé des séropositifs en 2021.

Là encore, les campagnes d’information et de santé publique sont les premières sources pour reprendre la main sur les discours erronés et sur les personnes rétives à voir la réalité du VIH d’aujourd’hui, et de celles et ceux qui vivent avec. Faisons aussi des 3 jours de collecte du Sidaction, des journées de sensibilisation et d’information, cela reste toujours un impératif.

HES propose : 

  • Organiser régulièrement, en concertation avec les associations engagées sur le terrain, des campagnes de communication contre les discriminations et les préjugés liés au VIH-Sida.

Voir Lutte contre les discriminations

La PrEP (prophylaxie préexposition) est un médicament destiné aux personnes exposées aux contaminations au VIH-​Sida, notamment les HSH (hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes), pour éviter les contaminations (à l’image d’autres traitements préventifs, terme utilisé en épidémiologie) et peut être prise, en continu ou à la demande.

Elle a été autorisée en France par la gauche dès 2015 et depuis prise en charge à 100 % par l’assurance maladie. Un suivi précis et un dépistage des autres IST est prévu tous les 3 mois.  De nombreuses recherches scientifiques ont démontré l’utilité de ce traitement dans la lutte contre le VIH-​Sida. Depuis son autorisation, plusieurs dizaines de milliers de personnes sont engagées dans un parcours de suivi médical, auprès de professionnels exerçant dans les Cegidd notamment.

Ils ont donc une série d’examens sur une fréquence régulière. La PrEP fait partie de l’arsenal varié de lutte contre le VIH, avec le préservatif, les dépistages réguliers, le recours au TasP (Treatment as Prevention, le traitement comme mode de prévention) pour les personnes vivant avec le VIH et les traitements postexposition (TPE). C’est un outil efficace et permettant d’envisager concrètement l’objectif « un Monde sans Sida en 2030 », comme le développe Onusida.

HES propose : 

  • S’assurer de la possibilité réelle de la prescription de la PrEP en médecine de ville, afin d’en améliorer la couverture parmi les personnes les plus exposées. Cela requiert aussi de s’assurer d’un accueil et écoute chez les médecins généralistes pour que, notamment, les HSH puissent se confier et être suivis, sans attitude discriminatoire, voire maltraitante.

Contre la financiarisation de l’industrie médicopharmaceutique

L’épidémie de Covid a contribué à révéler au grand public la très/​trop grande dépendance de la France et de l’Europe vis-​à-​vis de l’Asie (Chine, Inde) pour des équipements, accessoires médicaux (masques, gants, blouses) et médicaments « de base » (paracétamol, analgésiques). On a même vu, au début de la crise de la Covid, des reventes « sauvages » et des spéculations insensées au plus offrant sur certains de ces produits, y compris sur des tarmacs d’aéroports…

Les délocalisations sont allées très loin, et ont fragilisé nos systèmes de santé. Nombre de médicaments sont à flux tendus, voire en pénurie, aggravés par la distance et en cas de crise sanitaire ou diplomatique. Or, la santé ne peut pas être mise aux enchères, car des vies sont en jeu. La lutte contre le VIH-​Sida et les IST passe aussi par l’accès à des médicaments et à des thérapies pour les malades.

Ces produits font l’objet de brevets imposants, parfois abusifs et démultipliés, et de vente à des prix élevés rendant compliqués leur achat, même en France et en Union européenne. Outre ces actions de prévention contre les brevets et l’utilisation martiale de leur commerce par de grandes firmes, il est impératif de redire – et d’en faire une action politique assumée – que le vivant ne se brevète pas, qu’il s’agisse de microorganismes ou de gènes modifiés…

  • Accompagner et soutenir les actions des associations et ONG luttant contre les prix élevés des produits pharmaceutiques, afin d’en assurer l’accès à toutes les populations, ici ou ailleurs.
  • Une maitrise des enjeux de fabrication et des couts de production qui passe par la maitrise des brevets et des productions abordables, sans ériger la lucrativité comme première ou ultime démarche.
  • Définir une politique publique du médicament, de la conception à la production des principes, permettant de promouvoir la recherche, notamment publique, et le développement par des groupes français et européens, avec production sur les sols de l’Union.
  • Un guidage par la puissance publique, en transparence, de la réimplantation de la production et, d’abord, d’une évaluation des sites de production en UE, et des stocks. Cela doit conduire à une action de pour éviter, par exemple, les refus de distribution de médicaments pour stocks faibles aux personnes trans qui suivent un traitement, parce que d’autres patients les mériteraient davantage…
  • Utiliser les possibilités prévues dans les accords internationaux sur la propriété intellectuelle pour agir sur la production de produits pharmaceutiques, et lutter contre les prolongations indues des brevets.

La santé ne se limite pas à l’absence de maladie, mais s’étend au « bienêtre physique, mental et social dans le domaine de la sexualité » et « requiert une approche positive » au sens où l’entend l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Or les lesbiennes sont particulièrement exposées, en raison de leur orientation sexuelle, à la stigmatisation et aux violences.

On doit aussi mentionner les questions et enjeux liés à la sexualité (entrée dans la sexualité, pratiques, trajectoires), à la vie affective et relationnelle (conjugalité, violences entre partenaires) ou à la violence sexuelle (relations sexuelles non pleinement consenties, agressions, « viols correctifs », mariages forcés).

Ces discriminations, ces stigmatisations et ces violences, subies dans le cadre de la santé contre les lesbiennes, ont de nombreuses répercussions que ce soit sur leur santé mentale, mais aussi sur leur santé sexuelle. Souvent victimes de préjugés, les lesbiennes se sont fréquemment heurtées à des praticien·ne·s ignorant leur santé sexuelle, ce qui a pour conséquence la dégradation de leur santé mentale, mais aussi de leur santé sexuelle.

La crainte d’être confronté à de la lesbophobie mène de nombreuses lesbiennes à renoncer à des soins gynécologiques (ex. : frottis cervico-​utérins). Des politiques publiques visant à réduire structurellement ces diverses discriminations et violence ont et doivent avoir un impact sur le bienêtre et la santé mentale des femmes lesbiennes, ne pas présupposer de l’orientation sexuelle de la personne ou du nombre de ses partenaires sexuelles.

Tout l’enjeu de la prévention repose aussi sur la formation et la qualité d’accueil et d’écoute du personnel médical. Celui-​ci ne devrait pas préjuger de l’orientation sexuelle d’un·e patient·e et, à fortiori, ne pas orienter sa pratique, son diagnostic et son accompagnement en partant du postulat qu’il aurait élaboré en son seul for intérieur, sans échanges avec la personne soignée.

En effet, au-​delà de la gêne et du malaise ressenti par la patiente, c’est une écoute et un accompagnement au mieux inadaptés, et au pire maltraitants, qui risquent d’être mis en œuvre. Il est donc vital de lutter contre la présomption d’hétérosexualité, ainsi que le mégenrage dont sont victimes les personnes LGBTI+ et qui les poussent à ne plus consulter.

Le manque de prise en compte des pratiques sexuelles et les renoncements forcés ont conduit les organisations de santé et les pouvoirs publics à se détourner totalement du sujet, jugeant même que les pratiques sexuelles des femmes lesbiennes sont « sans aucun risques ». La difficulté pour certain·e·s soignant·e·s de se représenter une sexualité active et pénétrante en dehors du principe masculin, conduit beaucoup de lesbiennes à développer un sentiment d’immunité au VIH. La santé sexuelle ne se limite pas à l’absence de maladie !

Selon l’enquête de « Contexte de la sexualité en France (CSF) », il y existe une prévalence d’IST élevée chez les femmes lesbiennes, 12 % ont rapporté avoir eu une infection sexuellement transmissible dans les 5 dernières années (3 % chez les femmes hétérosexuelles).

HES propose :

  • Mener des actions d’information et de prévention sur la santé sexuelle des lesbiennes en développant des actions préventives relatives aux IST chez les lesbiennes. 
  • Organiser (de manière trimestrielle) des campagnes spécifiques de dépistage du VIH, des hépatites virales et des autres IST. 
  • Développer et promouvoir des actions locales (ateliers, réunions) de prévention des MST, IST. 
  • Renforcer la prévention et le dépistage du cancer du sein et du col de l’utérus. Cela nécessite la diffusion d’informations et de documentations spécifiques relatives aux facteurs de risques.
  • Mettre à disposition dans les lieux de santé des moyens de prévention : préservatifs féminins, digues dentaires, gants, doigts en latex, ainsi que dans les supermarchés, avec une politique de prix et de taxation qui permette l’accès au plus grand nombre.
  • Garantir aux femmes ayant des rapports sexuels avec d’autres femmes, la possibilité de choisir leur contraception, si elles en souhaitent une. 
  • Inciter la création de projets de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) intégrant les problématiques de santé sexuelles des lesbiennes.
  • Veiller que durant chaque visite gynécologique, psychologique ou de médecine générale quel que soit le motif de la visite, que le praticien​.ne ne présuppose pas de l’orientation sexuelle de la patiente en utilisant un langage inclusif. 
  • Encourager les projets d’association LGBTI+ à l’instar du projet « GO TO GYNECO ! », qui a pour objectif de créer un espace d’échange entre les associations LGBTI+ et les professionnel·les de la gynécologie, la psychologie et la médecine générale afin de leur permettre de mettre à jour leurs connaissances concernant les spécificités de la santé sexuelle des femmes ayant des rapports sexuels avec d’autres femmes et ainsi d’améliorer leurs pratiques. 
  • Proposer des brochures, ateliers et supports de prévention multiples et diversifiés (dans leur forme, leur style et leur contenu) afin de toucher tous les publics : les femmes se définissant comme lesbiennes comme celles ayant simplement des attirances et/​ou des pratiques homosexuelles.
  • Garantir à toutes les femmes ultramarines les conditions les plus favorables au développement de la santé sexuelle, par la prévention, l’accès aux soins et aux prises en charge.
  • Instaurer des espaces d’échange et d’écoute et de créativité autour des représentations que les lesbiennes ont de leur corps, de la féminité et de la masculinité, ainsi qu’autour du vécu de la maladie pour celles qui y sont confrontées.
  • Promouvoir les campagnes de vaccinations HPV (les papillomavirus humains) chez les jeunes, responsables de plusieurs cancers : col de l’utérus, l’anus, l’oropharynx, la vulve, le vagin, la cavité orale et le larynx.

Le chemsex (contraction anglo-​saxonne des mots « sex » et « chemicals ») désigne l’usage de drogues dans un contexte sexuel. Cette pratique, notable parmi les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) provoque des problèmes lourds d’addiction.

C’est « une expérience individuelle de plaisirs qui vont bien au-​delà de la stricte consommation de produits et de la sexualité », mais dont « les trajectoires (d’implication ou d’abandon) se caractérisent par leur extrême diversité » (Enquête « Apaches – Attentes et PArcours liés au CHEmSex » de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives).

C’est un véritable enjeu de santé publique. Les drogues utilisées sont un panel varié de produits psychoactifs, aux effets très fortement addictifs. Il s’agit de psychotropes ou de drogues de synthèse peu chères, dont l’accès est aisé dans l’achat en ligne via des sites ou applis, certains sont dits « récréatifs » (en milieu de « clubbing » par exemple), Crystal Meth, 3MMC, GHB/​GHL, cathinones (issues de feuilles de khat, ou de synthèse), « Tina », kétamine, MDMA (ecstasy)…

Ils sont utilisés avec la volonté d’accroitre des « performances » et d’augmenter les sensations durant l’acte sexuel. Ils sont souvent responsables de soucis cardiaques (tachycardie, palpitations), d’hallucinations, d’agitation pouvant mener au délire et jusqu’au décès d’utilisateurs, y compris jeunes et sportifs. Les médecins rapportent depuis des années de nombreux cas de comas et des décès.

La complexité pour traiter sereinement ce sujet vient de la conjugaison de plusieurs tabous : ceux liés au sexe (notamment à la sexualité des personnes LGBTI), aux drogues et à la mort. Le phénomène a été d’abord mis en évidence chez certains gays « clubbers » aux États-​Unis ou au Royaume-​Uni, ou de grandes métropoles.

Il s’est très largement étendu et répandu dans divers pays et milieux depuis les années 2005/​2010. Il concernerait à présent plus de 15 % de femmes et 25 % d’usagers en milieu rural. Cette pratique, en développement important selon tous les acteurs de terrain depuis environ 15 ans, a de nombreuses conséquences sur la santé corporelle et psychique et sur la vie des usagers.

Les conduites à risques sont plus importantes parmi les usagers et font qu’un « chemsexeur » sur 3 est séropositif (Étude Sea, Sex et Chems, Dr Cessa), mais elles sont aussi « affaire de méconnaissances d’une part et d’un rapport personnel aux prises de risques d’autre part » (Apaches). Les confinements et replis au domicile dus au Covid ont accentué ce phénomène. Ainsi que les enquêtes et études le recommandent (et avec les recommandations globales qu’elles indiquent).

HES propose :

  • Réaliser un état des lieux exhaustif des outils de prévention existants et diffusés auprès des « chemsexeurs », en France et à l’international.
  • Associer les éditeurs d’applications de rencontre à la diffusion des outils de prévention.
  • Mettre en évidence les bonnes pratiques mises en place dans les pays de l’UE et les dupliquer avec une déclinaison au niveau national.
  • Des campagnes de prévention, brochures, sites web clairs, interventions précoces sur le sujet, dans la cadre d’un plan national d’information et de réduction des risques (RdR) à élaborer rapidement entre États, associations, experts de santé, sexologues, addictologues, monde festif, collectivités locales volontaires et les services de police/​justice concernés. 
  • Une politique d’information et d’éducation à la réduction des risques (RdR) pour les personnes concernées (à la fois dans l’usage de drogues et en santé sexuelle).
  • Allier approches médicopsychosociale et communautaire : parcours d’accompagnement…

Cela peut paraitre évident, mais il est utile de réaffirmer que le premier moyen de lutte contre la pandémie de VIH-​Sida consiste à assurer concrètement et réellement l’accès à l’information et aux soins aux personnes qui en ont besoin. Cela implique la disponibilité des traitements, mais aussi l’absence de tout obstacle financier dans le dispositif de soins. La disponibilité des traitements est aussi un outil de réduction du risque de transmission, grâce à la maitrise de la charge virale qu’ils peuvent permettre. Raison de plus, s’il en fallait, pour lever toutes les barrières à l’accès aux traitements. Ces barrières peuvent s’observer en France (franchises médicales, prix excessifs de certains médicaments) comme à l’international (protections excessives des brevets qui font obstacle à la production de traitements dans les pays du Sud).

HES propose :

  • D’encourager la production et la diffusion de médicaments génériques, en France comme à l’international, en concertation avec les patients afin de permettre une réduction de la participation financière qui leur est demandée.
  • De réviser le dispositif des franchises médicales, à la création duquel les socialistes se sont opposés, au moins pour les affections graves et de longue durée.
  • Demander la continuité de soins – avec la caisse des Français de l’étranger (CFE) – pour les affections de longue durée (ALD) et les personnes en situation de handicap, avec la prise en charge au tarif local pour une période tampon d’au moins un an (longs déplacements à l’étranger et/​ou début d’expatriation). 
  • Faciliter la prise en charge par la CFE de la télémédecine avec des professionnel·le·s de santé francophones. La mise en place peut se faire avec des professionnels de santé conventionné·e·s des pays et territoires d’outre-mer pour couvrir l’ensemble des fuseaux horaires.
  • Demander la levée des blocages commerciaux pour l’exportation de médicaments prescrits pour les ALD afin de lutter contre le commerce des contrefaçons.

La santé mentale reste, hélas, la grande oubliée des questions de santé publique en France, de manière générale. Outre les brimades quotidiennes, le sentiment d’isolement de beaucoup de jeunes (et moins jeunes) LGBTI+ et des agressions en hausse, les conséquences aggravantes de la Covid-​19 – comme les confinements – ont accru la pression mentale également sur les LGBTI.

Avec la difficulté à sortir du milieu familial parfois hostile, à se rencontrer, à trouver des conseils auprès des associations, les réunions vidéos ne remplacent pas le vrai contact humain… médecins d’urgences psychiatriques, des psychiatres, psychologues, infirmiers, éducateurs et associations font un constat unanime sur le manque important de professionnels formés, de lieux d’accueil psy et de lits. Tout cela concourt, pour les personnes LGBTI+ en plus, à une santé mentale dégradée.

De prime abord, il faut intégrer que, comme en santé physiologique, la stigmatisation des personnes LGBTI+ représente un facteur important de leur santé mentale (c’est un déterminant de santé). La manière dont les personnes LGBTI, dont les minorités sexuelles sont tolérées, puis acceptées, puis incluses, puis deviennent de vraies citoyennes à part entière avec leurs droits et l’accès à ces droits équivalents à ceux de la population joue un rôle.

Mais plus encore, c’est dans le poids des normes sociales et des représentations que se nichent encore les risques d’exclusion, de stigmatisations, de difficultés – de la plus légère à la plus grave – d’être soi-​même pour et ont un impact sur leur santé mentale.

« Proposé par Meyer en 2003 pour rendre compte de la plus grande prévalence des problèmes de santé mentale chez les LGBTI+. Le modèle du stress minoritaire présente les personnes LGBTI+ comme un groupe minoritaire exposé à une source de stress supplémentaire par rapport à la majorité hétérosexuelle de la population. Ce stress excédentaire tire sa source de préjugés, stigmatisations, voire discriminations – volontaires ou non – du groupe majoritaire envers le groupe minoritaire, dans “une société qui nie, autorise, reproduit, et parfois même encourage l’intolérance, l’ignorance et l’agressivité à leur égard” ».

L’épidémie de Covid n’ayant pas amélioré, loin de là, les effets des stigmatisations et des violences et difficultés rencontrées dans le cadre familial. La moitié des HSH âgés de moins de 20 ans rapportaient avoir été victimes de violences familiales (enquête « Rapport au sexe » – ERAS – Spécial Covid-​19, réalisée du 30 juin au 15 juillet 2020).

Focus

Aucune donnée d’enquêtes nationales ne documente les pensées et comportements suicidaires chez les personnes trans, en France.

Les hommes et femmes LGB présentent par rapport aux hétérosexuel·le·s, au moins 1,5 fois plus de risques de troubles mentaux et dépressifs.

16 % des hommes gays et 18 % des femmes lesbiennes déclarent avoir fait au moins une tentative de suicide dans leur vie.

Chez les hommes gay/​bisexuels, 1/​3 des moins de 20 ans ont déclaré au moins une tentative de suicide au cours de leur vie.

L’âge médian de la première tentative était à 16 ans, et la plupart des tentatives observées avant 25 ans.

Une prévalence des violences physiques, psychologiques et sexuelles intrafamiliales subies avant 25 ans plus importante qu’en population générale.

Chez les LGB par rapport aux hétérosexuel·le·s à 3 fois plus de faire au moins une tentative de suicide dans la vie.

Chez les (futurs) LGBT, des symptômes dépressifs susceptibles de se manifester dès l’âge de 10 ans.

Les jeunes LGB, par rapport à leurs pairs hétérosexuel·le·s, présentent un risque significativement plus grand d’effectuer une tentative
de suicide, en particulier les jeunes transgenres.

Sources : Enquête « Violences et rapports de genre », Ined (2015) ; Repères en prévention et promotion de la santé : La santé mentale des personnes LGBT, Instance régionale d’Éducation et de promotion de la santé et Centre régional d’information et de prévention du Sida Auvergne – Rhône-Alpes (mars 2020, MàJ, octobre 2020).

La précarité matérielle pèse sur la santé mentale

Les Français face à la précarité matérielle, étude menée pour la Fondation Jean-​Jaurès et « l’Agence du Don en nature » sortie en novembre 2021, pointe le « fort impact psychologique et symbolique » de la précarité matérielle dans la vie des personnes concernées, la démontré que depuis le début de la crise sanitaire, pour plus d’un tiers des Français (36 %) la situation financière s’est dégradée, « L’incapacité d’accès à certains produits entraine d’autres privations selon une logique de renoncement ». Près d’un Français sur 3 (31 %) renonce plus de quatre fois par mois à l’achat de produits non alimentaires de première nécessité. Les jeunes, les travailleurs précaires, les ménages aux revenus les plus modestes (aux alentours de 1 300 euros) sont les plus touchés.

Pour la Fondation Jean-​Jaurès, « la précarité matérielle ne peut pas être réduite à la seule idée de manque. Elle a des conséquences plus graves ». Elle génère de la frustration pour 56 % des personnes interrogées, un sentiment d’injustice (41 %), mais aussi de la colère chez 28 %.

HES propose : 

  • Organiser, par les services de l’État concernés, des enquêtes régulières sur la santé mentale des personnes LGBTI, et notamment trans, afin d’avoir des données statistiques pertinentes, croisées selon les indicateurs qui seront les plus efficaces (démographiques, sociaux, économiques, géographiques).
  • Organiser efficacement, dès le plus jeune âge, une lutte contre les stéréotypes et les discriminations pour travailler contre les problèmes de harcèlement et de stratégie de bouc émissaire dans les établissements scolaires (former le personnel scolaire de l’Éducation nationale et toutes les personnes intervenant dans ce cadre).
  • Appuyer les structures LGBTI+ en les dotant de moyens pérennes afin que l’action communautaire puisse être le relai efficace de situations personnelles qu’elle serait amenée à connaitre.
  • Définir des points et modes de liaisons entre les autorités sanitaires et les associations LGBTI+ pour faire les remontées depuis le terrain.
  • Visibiliser et communiquer sur l’existence du Pôle discriminations, violences et santé (PVDS) et sur ses travaux et offres de formation, afin de créer des espaces d’écoute pour les victimes des formations de référents au sein des milieux scolaires contre le harcèlement et les violences psychiques.
  • Engager les ARS à financer des actions de ce type en milieu scolaire à tous les degrés, avec des structures professionnelles et des associations.
  • Mettre en place une campagne nationale sur la santé mentale, pour parler de ces sujets, proposer des moyens d’information et de contacts de professionnels.
    La campagne devra intégrer les dimensions populationnelles du sujet.

Après un calendrier plus que chaotique et des déclarations venant de la majorité parlementaire et de l’exécutif Macron/​Castex qui auront été hésitantes, foisonnantes et contradictoires, méprisantes, ignorantes de l’état de la législation en vigueur à l’époque et cherchant aussi à récupérer le sujet dans une optique peu glorieuse ; la loi a fini par être votée.

Après quelque 3 ans durant lesquels les travaux de journalistes, à travers ouvrage et documentaire, auront démontré la réalité tangible de pratiques que la majorité a cru relever d’un autre âge et d’autres lieux de notre monde, il aura fallu toute la pression des associations et une action déterminée d’une poignée d’activistes pour que les TDC soient interdites dans nos textes nationaux. Et il ne faudrait pas croire que ces actes désormais illégaux soient cantonnés à la seule sphère religieuse ou « spirituelle ».

Ce parcours ubuesque du projet de loi aura permis de voir le peu de cas que faisait le gouvernement et la majorité macroniste des sujets LGBTI+, y compris quand ceux-​ci mettaient directement des vies en jeu.

Hélas, aussi, outre la dangereuse inefficacité de cette majorité à avancer sur ce texte, c’est toute la droite et l’extrême droite qui auront profité de cet espace de débat pour y délivrer une transphobie autant ridicule par ses arguments, jamais dénoncés, qu’assumée. Les débats parlementaires aussi bien à l’Assemblée qu’au Sénat ont été d’un niveau que nos concitoyen·nes trans n’auraient jamais dû subir.

Les prises de paroles ont été faites « contre des mouvements de transaffirmation », qui engendrent des « ruptures avec sa famille », et qui passent par la « création d’un idiome et d’une “novlangue” pour nourrir ces fantasmes ». Nous avons aussi pu entendre parler de « diffusion de croyances avec inflation de demandes de changement de sexe » et un argument plus classique, mais jamais inutile pour exprimer non seulement la transphobie, mais également un nationalisme populiste et une xénophobie tranquille : « Ça arrive depuis chez nos voisins ». Ces propos sont outranciers, faux et n’ont aucun fondement ni scientifique ni statistique et sont loin des réalités de la vie des LGBTI+ et notamment des trans.

La loi adoptée – à quelques semaines à peine de la fin de la législature –, il reste différents aspects qui nécessitent d’être suivis et des actions menées par la puissance publique.

HES propose :

  • Publier les décrets d’application de la loi interdisant les TDC pour qu’elle s’applique et joindre dès 2022 des moyens de vérification de l’interdiction sur tout le territoire.
  • S’assurer des moyens confiés à la Dilcrah, à la Miviludes et tous les services, organismes et autorités publics pour faire appliquer rapidement, dans les faits, l’interdiction des TDC.
  • Permettre aux associations de pouvoir réaliser des testings, comme la loi le prévoit dans la lutte contre les discriminations, pour faire constater les violations de la loi et de vite sanctionner les organismes et personnes coupables.
  • Refuser systématiquement que la lutte contre les TDC soit l’occasion d’une diffusion de la parole transphobe accompagnée de mensonges éhontés (aucune chirurgie n’est possible en France sur les ados trans). 
  • Récupérer des indicateurs précis pour l’application de cette loi sur tout le territoire, comme pour d’autres domaines des droits LGBTI+.

Finances et assurances

Le remplissage d’un dossier médical lors d’une demande de crédit à long terme, principalement pour des opérations immobilières, est une formalité pour un certain nombre de Français·es, mais il représente aussi une épreuve pour beaucoup d’entre eux et elles. Faute d’un dossier médical « parfait », les primes d’assurances et les refus n’ont pas disparu.

La solution trouvée par le législateur le 6 janvier 2007 a été la création de la « convention Aéras », pour celles et ceux ayant ou n’ayant plus un grave problème de santé (cancer, ou autres maladies graves, accident). La soumission d’un accès aux prêts bancaires, par une convention spécifique pour les personnes à risques médicaux pour une gestion de l’assurance spécifique, laisse toujours des difficultés notamment pour les PVVIH.

La loi actuelle (en décembre 2021) donne un « droit à l’oubli » de 10 après une pathologie lourde pour revenir à un taux d’assurance-crédit norma : ce délai doit être baissé à 3 ans maximum.

Survivance d’une époque où les PVVIH, par manque de traitements efficaces contre le VIH, avaient une espérance de vie plus courte que les autres personnes et étaient frappées d’une interdiction d’accès au crédit, les conventions Aéras permettant aux PVVIH de pouvoir accéder aux crédits immobiliers, continuent de les placer dans une situation où les niveaux d’assurance sont encore au-​dessus de ceux de la population et parfois à des niveaux augmentant considérablement les échéances et bloquant de fait l’accès à un projet immobilier.

En 2021, en France, une personne qui suit un traitement contre le VIH-​Sida et a donc une « vie normale », et est suivie régulièrement, lui donnant l’occasion d’avoir une espérance de vie similaire à celles de la population générale. Ces dispositions spécifiques ne devraient pas lui interdire l’accès aux conventions assurantielles classiques des organismes bancaires.

La révision de la grille « Aeras » qui a eu lieu en mars 2021 aurait dû signaler la fin du parcours du combattant pour les PVVIH, mais ce n’était qu’un pas d’une démarche, restée inaboutie. Il faut développer le travail sur ce sujet et obtenir la suppression des surprimes et les limitations de garanties imposées qui continuent de perdurer.

À ce jour (en janvier 2022), l’examen de la « proposition de loi pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l’assurance emprunteur » pouvant faire évoluer la grille Aeras et ce qui est contenu dans le droit à l’oubli est en première lecture au Sénat.

HES propose : 

  • Une révision de la « convention AÉRAS », avec les parties concernées et les associations de lutte contre le VIH-​Sida et les professionnels de santé du Conseil national du Sida (CNS), qui aboutira à la fin des surprimes liées à une seule séropositivité chez les personnes désireuses de réaliser un emprunt immobilier, de consommation ou professionnel. 
  • Intégrer au sein de cette révision, une inscription de la fin des limites de garanties afin que le décès ne soit plus l’unique garantie, ou presque, mais que tous les risques possiblement couverts par une assurance de même niveau pour une personne sans souci de santé, soient intégrés également (perte d’autonomie, incapacité temporaire ou définitive). 
  • Aboutir à la fin de la convention spécifique pour les PVVIH dans le cadre de la souscription à un emprunt immobilier et les réintégrer dans le giron des assurances bancaires classiques par tous les organismes les proposant. S’assurer, pour cela, qu’aucune restriction ou surcote assurantielle ne soit reprise par les organismes bancaires et le faire inscrire dans les lois correspondantes (Code du Commerce et Code des Assurances). 
  • Organiser des rencontres supplémentaires entre les acteurs concernés afin que d’autres pathologies fassent l’objet d’une grille de référence, comme le demandent les associations.

Soins funéraires

Depuis 1986, un·e défunt·e porteur·se du VIH-​Sida ou d’une hépatite virale ne peut pas bénéficier de soins post-​mortem, soins de conservation apportés à chaque personne décédée, qui en a manifesté la volonté, par les thanatopracteurs. La levée de cette interdiction était en cours, lors de la rédaction du premier Manifest’HES en 2016, mais cela s’avère être un processus complexe qui rencontre des résistances (un corporatisme hors de toute rationalité médicale) qui, en l’état actuel des connaissances médicales, n’ont plus de fondement sanitaire.

Il aura fallu un arrêté, élaboré par la gauche en 2017, mais mal mis en œuvre sous Macron, pour que cette pratique devienne enfin possible. Il faut rappeler ici le travail des associations de lutte contre le VIH-​Sida pour arriver à un résultat concret mitigé, mais rendu obligatoire par le lobbying intense des entreprises de thanatopraxie qui ont fait en sorte que les textes de loi préparés auparavant ne voient jamais le jour.

HES propose :

  • Rester vigilant sur l’application de cet arrêté. Revoir l’arrêté et ne pas hésiter à réviser son contenu, si les circonstances et les demandes des associations l’imposent.
  • Fondre l’arrêté, dans un texte de loi, afin de le sortir du bloc règlementaire, par nature moins contraignant et persistant que le législatif.