Photo HES /​Bicanski @ Pixnio

Une 2e période de confinement, aux contours plus vagues et flous que la première, a débuté aujourd’hui. Quoi que l’on pense de la stratégie, force est de constater que les critiques qui se font jour contre un président et un gouvernement qui, dès l’été, se prétendaient sur toutes les ondes bien « préparés » avant cette 2e vague, mais qui paramètre la réponse à la pandémie selon la vieille technique du doigt mouillé, ne sont pas sans fondement.

Pourtant, dans ce choix du reconfinement, il est vital que les autorités tirent les leçons de la période de mars à mai dernier. Ce choix a différents impacts directs sur les vies des LGBTI+ dans différentes situations.

HES pense et soutient d’abord les fonctionnaires et les agents chargés de missions cruciales et d’intérêt public formant la « première ligne » face à cette crise sanitaire et sociale, les professeurs, les agents d’entretien et de propreté, les forces de sécurité… et en premier lieu l’ensemble du secteur médical et hospitalier. Leur vie professionnelle touchant déjà largement leur vie privée, de couple et de famille, est mise à rude épreuve depuis mars dernier, en plus de leurs conditions de travail au quotidien. 

Pour les LGBTI, le confinement aggrave des situations déjà complexes

Premiers des risques : l’isolement. C’est un risque sanitaire et psychologique reconnu comme accru pour les personnes LGBTI+. L’impact de l’isolement physique et social, ajouté à la forte hausse des violences depuis 3 ans en France et au contexte de menaces terroristes, peut conduire à des dépressions, des situations psychiques dégradées.

Les politiques publiques de santé pertinentes doivent intégrer cette dimension et fournir les outils nécessaires, de communication, de prévention, ainsi que renforcer et aider les acteurs de terrain qui permettent d’éviter des situations personnelles parfois dangereuses.

Accès à l’extérieur prohibé pour les jeunes LGBTI : la cellule familiale peut représenter un danger

Les jeunes LGBTI ne doivent pas se retrouver victimes collatérales de décisions sanitaires tardives et problématiques. Le premier confinement, imprévisible, a poussé les associations à interpeler directement les pouvoirs publics pour les forcer à mettre en place des stratégies d’aides et de protection pour les jeunes LGBTI dont les familles représentaient un danger potentiel.

Les risques d’insultes, de harcèlement voire d’agressions dans le milieu familial, au sein de son couple, du voisinage ou dans le milieu professionnel augmentent dans cette période où les possibilités d’évitement de situations tendues redeviennent impossibles ou presque. 

Parcours de soins et accès aux professionnels de santé : faire attention aux trans et intersexes

Pour les Trans et Intersexes, cette période est encore plus éprouvante, car elle ajoute manifestement des obstacles et de nouveaux délais lorsque ces personnes souhaitent obtenir une consultation médicale, pour différents soins, voire des interventions chirurgicales. 

Prises de risques accrues : produits addictifs (alcool, calmants/​psychotropes, drogues), tentatives de suicide… Les numéros d’appels, site web d’informations et associations formées au soutien et à l’aide doivent être confortés et davantage soutenus par les services de l’État, ses administrations centrales ou déconcentrées, par les ARS, mais aussi par la Sécurité sociale et les services publics de secours (SAMU, police, pompiers)…

Confinement et prostitution : éviter la précarité forcée

Les personnes travailleuses du sexe sont une nouvelle fois très exposées, à la fois par la menace aggravée de l’isolement, soumises à des clients plus rares, qui sont possiblement plus agressifs, violents, ou dangereux. La précarité de leur situation et les difficultés à pouvoir assurer un niveau de vie minimal laissent par exemple craindre que l’exigence par des clients de rapports non protégés ne puisse être refusée.

Pour leur éviter une dégringolade sociale quasi instantanée et une précarisation mettant leurs vies en danger, l’État est le seul acteur pouvant agir rapidement et sur tout le territoire, pour donner des directives claires notamment aux forces de sécurité, et accorder des aides d’urgence (argent, aliments, fournitures sanitaires de base…) à ces publics, en lien avec les organismes d’aide sociale de proximité. 

Contre l’épidémie de VIH aussi l’État doit rester mobilisé

Il y a quelques jours, Têtu indiquait que les délivrances de Prep et les consultations dans les Cegidd avaient connu une forte baisse par rapport aux projections dans la période du premier confinement. Ces données peuvent paraitre anodines au regard des obligations du confinement, mais ce sont de lourds obstacles à l’accès à la prévention et aux dépistages auxquels toute la population doit accéder. 

Les milliers de délivrances de Prep en moins sont autant de capacité en moins dans la lutte contre le VIH-​sida, que les seules activités associatives (par ailleurs fragilisées) ne sauraient compenser.

Les IST, dont le VIH-​sida, sont toujours actives aussi, les outils et informations de prévention, de dépistage, de traitement d’urgence, les soins et traitements doivent être assurés sans rupture ni délai. Les consultations médicales et les activités des centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic (Cegidd) doivent être autorisées et intégrées dans une stratégie de long terme pour éviter de nombreuses situations médicales personnelles difficiles par faute d’accès aux professionnels de santés et aux structures de soins. 

Enfin une réponse de l’État aux associations ? 

Contrairement au printemps dernier, l’État doit réagir rapidement. Il avait fallu attendre près de 6 semaines pour que le secrétariat d’État à la Lutte contre les discriminations livre un trop faible plan d’urgence sur la situation des personnes LGBTI. Et uniquement après que des dizaines d’associations dans tout le territoire l’ont interpelé ou répondu, à 2 reprises…

Nous espérons que les associations soient enfin suffisamment épaulées dans leur structuration de la solidarité au sein du tissu LGBTI. Nous espérons également que les dispositifs d’hébergement d’urgence soient remis en place pour éviter des mises en danger et des drames irréversibles.

L’État ne doit pas oublier son rôle central et encore moins attendre des associations qu’elles se substituent à lui en permanence et sans moyen.